Extrait
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Hizz Ya Wizz

Wissam Charaf

2004 - 26 minutes

France, Liban - Fiction

Production : Aurora Films, Né à Beyrouth Productions

synopsis

Ali est issu d’une famille modeste du Sud-Liban. Il vit et travaille à Beyrouth, comme assistant d’un photographe sportif. Ali est amoureux d’une jeune femme qu’il a aperçue lorsqu’elle participait à une compétition équestre. Ne sachant pas comment la séduire, il demande conseil à sa sœur. Celle-ci lui suggère d’écrire un poème à la cavalière...

Wissam Charaf

Wissam Charaf est né à Beyrouth en 1973. Habitant Paris depuis 1998, il est d’abord cameraman et monteur pour des reportages sur Arte et France 2, puis devient en 2008 correspondant de la chaîne franco-allemande, notamment au Liban, en Afghanistan, en Haïti et en Corée du Nord.

En 2004, il réalise dans son pays natal le court métrage Hizz ya Wizz, puis L’armée des fourmis (2007), sélectionné au Festival de Locarno.

En 2012, It’s all in Lebanon, long métrage documentaire, est récompensé au Festival de Carthage. Dans ce film, il s’interroge sur la situation au Liban depuis la fin de la guerre civile, sur la difficulté à reconstruire une nation unie dans un pays où la guerre n’est peut-être pas réellement achevée.

Son dernier court métrage Après (2016) reçoit le Prix de la presse et le Prix Bande à part au festival Côté court de Pantin et est sélectionné à Clermont-Ferrand.

Tombé du ciel, déjà présenté à l’ACID à Cannes en 2016, est son premier long métrage de fiction. En 2018, il réalise Souvenir inoubliable d'un ami, court métrage rencontrant un certain succès en festivals (il remporte notamment le Prix du GNCR au Festival Côté court de Pantin et une mention spéciale à Clermont-Ferrand). 

Wissam Charaf enchaîne ensuite deux films, produits par Aurora Films : un long métrage (Dirty, Difficult, Dangerous, distribué en France au printemps 2023) et un court (Et si le soleil plongeait dans l'océan des nues).

Critique

Hizz Ya Wizz, réalisé en 2004, est l’un des premiers courts métrages de Wissam Charaf. Son premier long, Tombé du ciel, sélectionné par l’Acid à Cannes en 2016 sort en salles ces jours-ci. Et son dernier court, Après, primé à au festival Côté Court de Pantin en 2016, était en compétition à Clermont-Ferrand en ce début d’année.

Tous sont situés au Liban, terre natale du réalisateur. Et dans chacun, en filigrane ou plus directement, il est question de l’héritage de la guerre civile qui a marqué ce pays de 1975 à 1990.

Cet héritage se perçoit ici par traces : criantes sur les façades, mal camouflées dans les intérieurs refaits. La violence resurgit par endroits, dans les gestes des plus jeunes brandissant leurs fusils en plastique, en surface, dans les surnoms, comme au plus profond de chacun des êtres. Rien de réellement pesant ou de dramatique, mais le sentiment plane, comme au-dessus d’un vide. Les traces de la guerre civile s’insinuent dans la banalité d’un quotidien presque morne. Celui des hommes surtout ; celui d’Ali.

Car pour ceux qui sont là, qui sont nés là, il est question de faire avec, d’évoluer malgré tout, de trouver un moyen de “se débrouiller”. Et Ali, lui, a décidé de séduire celle dont il est tombé amoureux. Il semble compter avant tout sur sa virilité, et tout autant en douter (quelques plans sur le corps de Raed Yassine suffisent à l’exprimer). Ne sachant pas comment s’y prendre, c’est à sa sœur qu’il demande. Car les femmes, elles, savent puiser dans toutes les ressources et continuent d’avancer. Elles travaillent, se cultivent, elles décident, elles exigent et sont déterminées à surmonter tous les obstacles. La sœur d’Ali lui suggère la poésie ; il se résout, bien qu’apparemment insensible, à en user.

Hizz Ya Wizz oscille ainsi constamment entre l’envol possible des désirs et la trivialité d’un quotidien terre à terre et de ce dont il est imprégné. Au milieu du vague terrain de foot ou embarqué dans la nacelle improbable d’un manège aérien, Ali semble tout à la fois naturellement là, dans une présence campée, et “à côté”. L’héritage de la guerre civile se ressent alors comme une ombre susceptible de plomber toute tentative d’envol vers la légèreté. Un poids qui pèse sur le quotidien malgré tout ce qu’il offre à saisir : l’amour, la poésie, la musique ou la douceur d’un paysage, ne serait-ce que le temps d’un sourire partagé.

Marie-Anne Campos

Réalisation et scénario : Wissam Charaf. Image : Gertrude Baillot. Montage : Vincent Coste. Son : Olivier Hespel et Julien Ngo Trong. Musique : Zeid Hamdan / Soap Kils. Décors : Randa Rizkallah. Interprétation : Raed Yassine, Peter Semaan, Cherine Debs, Darina El Joundi, Ali Diab et Leila Hakim. Production : Aurora Films / Né à Beyrouth Productions.