Extrait
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À la mer poussière

J-0

Héloïse Ferlay

2020 - 13 minutes

France - Animation

Production : ensAD et Vivement Lundi !

synopsis

Livrés à eux-mêmes dans le profond de l’été, Malo et Zoé tentent vaille que vaille d’attirer le regard fuyant de leur maman.

Héloïse Ferlay

Née en 1996, Héloïse Ferlay a grandi à Aix-les-Bains (Savoie), où elle a cultivé son goût pour le bricolage, les textiles et les histoires. Elle a ensuite étudié à l’École nationale des Arts décoratifs à Paris (ENSAD), où elle a réalisé Geôlier (2016), puis Yola (2017).

Diplômée en 2019, elle bénéficie d’une année supplémentaire au sein de l’école pour terminer son film de fin d’études, À la mer poussière (2020), sélectionné dans de nombreux festivals et plusieurs fois primé. Elle participe ensuite à la saison 8 de la collection En sortant de l’école avec une adaptation du poème d’Andrée Chédid, Les filles du vent (2022).

Installée à Rennes, elle développe actuellement un projet de court métrage écrit avec Anne-Claire Lehembre et intitulé Dans nos gorges.

Critique

Dans À la mer poussière, son court métrage de fin d’études à l’École nationale supérieure des Arts décoratifs (Ensad), Héloïse Ferlay met en scène des personnages et des décors faits de laine et de feutrine. On pense évidemment au travail d’Emma de Swaef et Marc James Roels, dont le court métrage Oh Willy (2012) a d’ailleurs représenté pour la réalisatrice la découverte d’un champ des possibles au cours de son cursus. Mais depuis le stage qu’elle a effectué sur le tournage de l’un des courts métrages du duo, Ce magnifique gâteau (2018), Héloïse Ferlay a créé son propre monde, entre contemplation et intensité émotionnelle, entre réalisme et embardées poétiques.

Dans À la mer poussière, l’apparente douceur des matières et de cet univers aux tons chauds contraste avec la dureté du récit. Celui-ci est en effet dominé par la figure d’un père absent qui hante une mère et ses enfants, Zoé et Malo, chacun isolé dans ses souvenirs, sa tristesse ou sa rancœur. Le personnage de la mère, au teint pâle et aux yeux délavés, apparaît comme fantomatique, véritablement déconnectée du monde, tandis que sa fille aînée la pousse dans ses retranchements pour provoquer un regain de vitalité. Quand celui-ci se produira, les personnages, qui semblaient atomisés tels des grains de poussière, se retrouveront à la mer, réunis dans un bain salvateur.

Ce rôle de l’eau fait écho à celui du feu dans le précédent court métrage d’école d’Héloïse Ferlay, Yola (2017), ou encore à celui de l’air dans son film suivant : Les filles du vent (2020), adaptation du poème éponyme d’Andrée Chédid et épisode de la collection En sortant de l’école consacrée à cette autrice. Les personnages retrouvent une intégrité physique au contact des éléments – l’eau qui lave de ce qu’on a vécu et participe ici d’une renaissance, le vent qui donne l’élan au corps et au cœur dans Les filles du vent

Cette importance des éléments dans la narration va de pair avec celle des matières dans le processus de création. La quête des personnages est d’autant plus visible et sensible qu’ils sont faits d’une matière organique – la laine frémit, ou se défait lorsque la mère est submergée par la tristesse, jusqu’à perdre le contrôle de sa voiture. La matière semble alors nous donner à voir les émotions que les personnages traversent et, s’il est de laine, le fil fragile de la vie.

Anne-Sophie Lepicard

Réalisation, scénario et montage : Héloïse Ferlay. Image : Charlotte Neri. Son : Antoine Martin et Lucien Richardson. Musique originale : Antonin Tardy. Voix : Amandine Bataille, Violette Renoir et Alix Deshay. Production : ensAD et Vivement Lundi !