
2006 - 9 minutes
France - Fiction
Production : Pétrouchka Films, Lithium Films
synopsis
Ce film retrace les dernières minutes d’intimité qui ont précédé, le 26 novembre 1974, l’entrée de Simone Veil dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale pour y présenter son projet de loi pour l’avortement.
biographie
Valérie Müller
Valérie Müller est née en 1965 à Issy-les-Moulineaux. Après des études d’histoire de l’art et de cinéma à la Sorbonne, où elle est l’élève d’Éric Rohmer, entre autres, Valérie Müller travaille comme assistante de production et régisseuse dans différentes sociétés de production, par exemple Ex Nihilo.
Elle réalise son premier court métrage, Un matin blanc, en 1995 puis dirige Marion Cotillard, notamment, dans La surface de réparation en 1998.
Elle signe en 2007, dans le cadre de la collection “Écrire pour…” initiée par les programmes Courts & création de Canal+, Les hommes s’en souviendront, dans lequel Marina Foïs tient le rôle de Simone Veil.
Son premier long métrage, Le monde de Fred, sort en salles en 2014, puis elle co-réalise en 2016 avec Angelin Preljocaj, son époux à la ville, Polina, danser sa vie, d’après l’œuvre graphique de Bastien Vivès. Juliette Binoche et Niels Schneider font partie de sa distribution.
Depuis, Valérie Müller a signé plusieurs documentaires en lien avec le monde de la danse : Danser sa peine (2019), Combattantes (2022) et La force de l'âge (2023).
Critique
Alors que le film vient d’être restauré et numérisé (par L’Agence du court métrage, avec le soutien du CNC), un certain mystère demeure sur ce qui conduisit la réalisatrice Valérie Müller à participer en 2006 sur la base d’une telle proposition au concours de scénarios lancé par Canal+ en vue de la nouvelle édition de sa Collection alors annuelle, basée sur le principe d’“Écrire pour…”. À savoir un acteur ou une actrice. Dans la liste figurait Marina Foïs et l’idée ne coulait pas forcément de source de l’amener à incarner Simone Veil, mais la comédienne alors plutôt identifiée aux registres comiques – notamment au sein de la troupe des Robins des Bois – relevait le défi. On était alors plus de quinze ans avant le biopic entrepris par Olivier Dahan, Simone Veil, le voyage du siècle (sorti en 2022), et contrairement au maquillage et/ou prothèses appliqué à son interprète Elsa Zylbersein, le court métrage passait outre tout souci de ressemblance : Marina Foïs n’a pas les traits de Simone Veil, mais son chignon, son tailleur Chanel, son foulard et des boucles d’oreilles plutôt “vieille France” suffirent à poser le personnage.
Au moment de la confection de ce film court, l’ancienne ministre de la Santé du gouvernement Chirac, alors que Valéry Giscard d’Estaing venait d’accéder à l’Élysée, est toujours vivante (et du reste remerciée au générique). Elle a alors publié, pour les trente ans de la loi portant son nom un livre chez Stock (en 2004, donc), intitulé Les hommes aussi s’en souviennent. En tordant le titre pour se placer au moment même de l’événement, ce film de moins de dix minutes se donne pour simple ambition d’accompagner la femme politique dans les derniers instants précédant son intervention au Palais Bourbon, achevant de se vêtir et se préparer chez elle avant de prendre sa voiture avec chauffeur et d’aller affronter à l’Assemblée la partie des parlementaires farouchement hostiles à son projet de loi sur l’IVG. Ceux-ci seront finalement mis en minorité, mais la violence des débats et de certaines réactions – voir la lettre lue en off sur le générique, que reçut Simone Veil de la part d’un pharmacien lambda, dégueulant notamment son antisémitisme des plus odieux, celui que n’avait pas renié toute une partie de la droite classique, sans même parler de l’extrême-droite (même si Jean-Marie Le Pen n’avait réalisé que 0,5% au premier tour de la présidentielle cette année-là – l’époque n’était quand même pas si mal !).
Et c’est dans une sobriété de style assumée que le film réussit à donner une image sans doute plutôt juste de ce moment historique majeur de notre Histoire contemporaine et dont on a quelque peu oublié depuis à quel point il fut lourd pour celle qui en fut l’initiatrice. L’immense courage qu’elle eut de mener son projet à terme suscite le respect et le discours qu’elle prononça le 26 novembre 1974 devant la représentation nationale demeure comme l’une des grands ciments de notre destin collectif, quel que soit le bord politique dont on se réclame. Les hommes – et les femmes ! – doivent s’en souvenir.
Christophe Chauville
Réalisation et scénario: Valérie Müller. Image : Philippe Roussilhe. Montage : Gwen Mallauran. Son : Julien Brossier et Pascal Vuillemin. Musique originale : Angelin Preljocaj. Interprétation : Marina Foïs, Olivier Soler, Aurélie Guichard, Jean-Marie Soler, Philippe Rabusseau et Michel Elias. Production : Pétrouchka Films et Lithium Films.