Extrait
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Oyu

Atsushi Hirai

2023 - 21 minutes

France, Japon - Fiction

Production : MLD Films, Nobo

synopsis

C’est le dernier jour de l’année et la nuit tombe sur la petite ville de Toyama, au Japon. Un homme se présente au bain public pour récupérer un objet oublié. Mais une fois à l’intérieur, la promesse d’un bain chaud le pousse à rester.

Atsushi Hirai

Né à Toyama au Japon, Atsushi Hirai étudie la réalisation à Tokyo, puis à Paris, où il s’installe en 2015. Il travaille alors en tant qu’assistant-réalisateur, pour Damien Manivel notamment (sur Takara, la nuit où j'ai nagé, Magdala et L'île).

Ce dernier produit en 2020 son premier court métrage professionnel, Retour à Toyama, qui est sélectionné en compétition internationale au Festival de Locarno, puis à Entrevues à Belfort, à Côté court à Pantin et au FIFIB à Bordeaux. Déclic, qui était autoproduit, l'avait précédé en 2017.

Oyu suivra en 2023 et, d'abord sélectionné à Cannes dans le cadre de la Quinzaine des cinéastes, fait le tour du monde des festivals, recevant de nombreux prix au passage (à Dresde, Palm Springs, Tampere, Vienne ou Winthertur).

Critique

À Toyama, où se trouve la maison de sa mère, le protagoniste d’Oyu se rend aux bains publics afin de récupérer un objet oublié et en profite pour s’offrir un moment de détente. Le paquet en question contient divers articles cosmétiques, qui ne lui appartiennent pas mais constituent les restes d’un être disparu. Le film ne lève que très progressivement le voile sur cette perte, qui est évoquée de manière indirecte à travers une série de détails éloquents, qu’il s’agisse de bribes de conversation sur la vieillesse et sur la mort, d’une maison que ne peuple plus qu’un tas de cartons vides ou encore de vieux clients, possibles avatars des proches absents.

À aucun moment le personnage ne pleure et pourtant, autour de lui l’eau coule à flots et le décor, comme embué de tristesse, vient figurer ses émotions profondes. En s’immergeant dans l’eau, l’homme replonge dans ses souvenirs et semble peu à peu diluer sa peine. Le grincement désagréable d’un fauteuil de massage qui ouvre le film cède ainsi la place au son plus apaisant de l’eau qui coule tandis que le temps s’étire à travers des plans fixes et longs, créant une parenthèse propice à la méditation. Alors qu’un plan frontal et resserré sur le protagoniste accentue son isolement, des silhouettes font leur apparition dans le reflet d’une glace et le cadre s’élargit pour faire rentrer d’autres personnages à ses côtés, à l’image de cet homme tatoué qui échange quelques mots avec lui avant de disparaître. Une présence féminine s’invite également à travers des voix qui résonnent au-delà de la cloison qui séparent les femmes des hommes.

L’espace du bain apparaît alors comme un lieu de sociabilité où différentes générations se croisent et où prendre soin de soi va de pair avec le fait de veiller sur les autres. Le protagoniste raccompagne ainsi une vieille dame victime d’un malaise jusqu’à sa maison déserte et obscure, où ne l’attendent ni mari, ni enfants. Si chacun d’eux regagne finalement sa propre solitude, ils auront au moins partagé un bout de chemin dans la nuit hivernale. De cette atmosphère évaporée, le personnage semble ressortir avec l’esprit plus clair et le cœur allégé et tandis que l’année s’achève, on sent déjà poindre la promesse d’un renouveau.

Chloé Cavillier

Réalisation : Atsushi Hirai. Scénario : Atsushi Hirai et Martin Bertier. Image : Benoît Pain. Montage : Jehan Folqué. Son : Gen Takahashi, Agathe Poche et Simon Apostoulou. Interprétation : Okihido Yoshizawa, Hisako Mizuki, Kôta Tsunezawa et Satchiko Okuno. Production : MLD Films et Nobo.

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