Light Cone : quatre décennies de rayonnement
À l’occasion des 40 ans de Light Cone, nul n’était mieux placé que sa présidente actuelle, Gisèle Rapp-Meichler, pour en faire la plus juste et précise des présentations.
Créée il y a 40 ans, Light Cone est une association à but non lucratif dont l’objectif est la distribution, la connaissance et la sauvegarde du cinéma expérimental dont elle s’attache à assurer la promotion en France et dans le monde. La défense d’un cinéma indépendant qui ne répond pas aux normes de l’industrie trouve ses affinités dans les beaux-arts mais est bel et bien constitutif du Cinéma. Depuis ses fondateurs yann beauvais (1) et Miles McKane à l’équipe actuelle, pilotée par Emmanuel Lefrant, Eleni Gioti et Gisèle Rapp-Meichler (sa présidente), Light Cone a trouvé son essor.
Après le feu de Jacques Perconte / © Light Cone, 2022.
Célébrer sur des décennies la longévité d’une association s’apparente à monter une exposition pour un artiste. Dans l’exaltation et le soulagement, cela permet de faire le point et de passer à la suite. L’histoire de Light Cone a souvent été évoquée depuis ses 40 ans d’existence au cœur du cinéma expérimental français (2). Parmi toutes les coopératives encore actives (3), elle s’est imposée par la taille de sa collection et par l’importance de son activité de passeuse de films, puisqu’il s’en est expédié près de 1 500 par an juste avant le Covid-19 et 1 200 l’an passé, dans le monde entier, sans compter la centaine de cessions de droits contractées par les musées.
Cette activité croissante est liée à sa capacité à faire évoluer sa collection d’œuvres contemporaines comme à constituer, restaurer et préserver un fond patrimonial, mais aussi à proposer des outils avec un atelier de post-production (4), un centre de documentation, des publications et des programmes de films, dont certains sont projetés mensuellement à Paris, au Luminor (5), et de préférence dans leur format d’origine. Le public vient très nombreux et sans défaillir, intéressé par des séances (dénommées “Scratch”) où se succèdent les découvertes et des mises en perspectives suggérées par des cinéastes, des programmateurs ou des invités, des critiques ou des historiens (ce sont nos séances “Scratch Collection”).
Performance de Metamkine / ©Light Cone, 2022.
Nous organisons annuellement un “Preview Show” destiné aux programmateurs. Nous venons de visionner près de 300 nouveaux films pour proposer ces programmes, on line depuis la pandémie. Celle-ci nous a amenés à créer des “Scratch focus” et des “Scratch dialogues” en ligne. Et tous les deux ans maintenant, nous organisons une soirée “Scratch Expanded” pour le cinéma dit “élargi”, avec installations, performances et projections multi-écrans. C’est à cette occasion que nous fêterons les 40 ans, aux Voûtes, les 17 et 18 juin au soir, dans le cadre d’une semaine de manifestations quotidiennes à Paris.
Le ballet mécanique de Fernand Léger et Dudley Murphy (1924) / © Light Cone, 2022.
J’étais membre de Light Cone en tant que cinéaste (6) et mon investissement plus actif dans l’association s’est décidé à un moment où sa situation était des plus critique, en 2006. Nous étions un groupe de cinéastes qui ne pouvions envisager la fin d’une collection déjà remarquable. J’ai accepté de prendre la présidence de Light Cone pour essayer de développer un modèle de coopérative tel que je le défendais depuis les années 1970 (à la Coopérative des cinéastes et à KMP8), en l’adaptant aux besoins et aux exigences actuels. Le noyau mis en place, autant l’équipe dirigée par notre pilier, Emmanuel Lefrant, que le conseil d’administration, (dont les historiques Cécile Fontaine et Patrick Bokanowski) s’est réellement battu pour trouver le modus vivendi nécessaire à la survie de l’association, mais aussi à son développement et à un fonctionnement productif qui garantit à une structure de rester vivante.
Aujourd’hui, si le pari initial est gagné, si la place de Light Cone est reconnue par l’ensemble du monde du cinéma, il nous reste toujours, en tant qu’association indépendante, à convaincre l’institution de l’indispensabilité de notre rôle et de notre collection, des plus importantes au monde. C’est grâce à ces quinze dernières années que j’ai vécues comme un combat rude et joyeux, que nous pouvons aujourd’hui fêter les 40 ans de l’existence de Light Cone. Des manifestations ont d’ores et déjà eu lieu, ici et à l’international, et la semaine du 13 au 19 juin, à Paris, en sera l’apogée !
1. Voir le texte de Raphaël Bassan sur le dernier livre de yann beauvais.
2. Voir le site de l’association et/ou se reporter à Bref n°104/105, automne 2012 : “Les trente bougies de Light Cone” par Raphaël Bassan.
3. Voir le texte de Raphaël Bassan publié sur Dérives.tv à l’occasion des 50 ans du Collectif Jeune Cinéma.
4. Informations sur l’Atelier 105 sur le site de Light Cone.
5. Sur les projections Scratch et leurs archives.
6. Voir à ce propos le numéro 84 de Bref, septembre-octobre 2008 : “Gros Plan Gisèle et Luc Meichler”, “D’une poésie populaire, incivile et savante” par Nicole Brenez. et le site des cinéastes.
À lire aussi :
- Sur les 40 ans de Light Cone à Paris, du 9 au 19 juin 2022.