Concours de la jeune critique 2024 : les lauréats des catégories Collège, Lycée et vidéo
Tous les ans, le Festival de Clermont-Ferrand organise son Concours de la jeune critique. Brefcinema est partenaires de l’opération et publie les textes retenus par le jury concernant collèges et lycées.
Grand prix de la catégorie Collège : Léo Guist’Hau, élève du Collège Marcel-Bony de Murat-le-Quaire (Puy-de-Dôme), pour son texte sur le film Apnées de Nicolas Panay (compétition nationale et séance scolaire, photo de bandeau).
Apnées de Nicolas Panay nous plonge dans un quotidien stressant et angoissant, au côté de Pierre, chef de chantier, en surcharge mentale, qui se fait totalement submerger par son travail épuisant : noyé sous des conditions de travail dangereuses, un manque de main d’œuvre, des problèmes quotidiens, des délais intenables, tout cela pour satisfaire quelques personnes cruelles seulement attirées par les bénéfices et l’argent et dans le désintérêt de la sécurité des ouvriers.
Le seul moyen pour lui de survivre face à l’hostilité de ce monde, est l’apnée... Retenir sa respiration lorsque l’on est au plus profond de ces eaux sombres. Quelquefois, pour échapper au brouhaha, Pierre remonte à la surface pour retrouver tout ce qui compte vraiment pour lui : sa femme et son enfant. Quand il est avec eux, le silence est roi. Plus aucun son venant agresser son ouïe et la notre. Mais ce petit bonheur ne dure pas. Le bruit... Toujours le bruit... Il revient... Encore !
Retransmis par de longs plans séquences en caméra embarquée, le stress lui aussi nous envahit, nous et Pierre. On ne peut y échapper et il finit même par nous enfermer dans les murs du chantier. Ainsi Pierre replonge... Sans pouvoir lutter... À bout de souffle... Totalement submergé... Et cela ne sera pas sans conséquences...
Grand prix de la catégorie Lycée général et technologique : Ambre Bellet, élève du lycée Jeanne-d’Arc à Clermont-Ferrand, pour son texte sur le film Le cri défendu de Charlotte Abramow (photo ci-dessus).
Un cri sur le parking d’un fast-food. Une femme de plus abîmée sous les coups de son mari. Une autre voix étouffée par un mutisme collectif ? Pourtant, cette fois-ci, un second cri résonne, fait écho, gronde, véritable clameur des soeurs qui défient les bêtes du sexisme et du patriarcat.
L’urgence est activée pour cette jeune femme aux cuisines du fast-food, la loi du silence est révolue, c’est la force de l’unité, de l’action qui prime désormais. “Il nous faut cette urgence, quand c’est une femme qui crie”, ce sont les mots de cette dernière qui s’adresse à nous en plan rapproché, sur un slam virulent. Le texte poétique donne le rythme, on se laisse emporter par des rimes croisées, embrassées qui s’accélèrent, deviennent de plus en plus fermes et puissantes, font naître une rage grandissante : l’urgence est évidente.
Les images évocatrices et symboliques se succèdent à l’écran. Des gros plans illustrent la violence inouïe des faits, d’autres véhiculent la rébellion qui se décharge rageusement sur les burgers du fast-food. L’esthétique est soignée, mais n’édulcore pas pour autant une atroce réalité. En effet, l’intention n’est pas d’embellir l’écran, au contraire les coupes franches entre les plans évincent la superficialité et laissent le message être central, dans la simplicité.
Entrelaçant brillamment slam et cinéma, Le cri défendu esquisse les lignes d’un fléau systémique sans laisser place à la fatalité, offrant un vent de renouveau où les femmes ne sont pas cantonnées au rôle de victime. Ainsi, c’est à travers le prisme de Charlotte Abramow, la réalisatrice, que naît un véritable appel à l’insoumission et à la sororité.
Grand prix de la catégorie lycée professionnels ex-aequo : Arthur Bouloc, du Lycée polyvalent de Haute-Auvergne à Saint-Flour (Cantal), pour son texte sur le film Apnées de Nicolas Panay (compétition nationale et séance scolaire, photo ci-dessus).
Le court métrage Apnées réalisé par Nicolas Panay est une exploration fascinante du temps, de la solitude et de la lutte intérieur d’un personnage en proie à ses propres démons. A travers une utilisation ingénieuse du temps, le film plonge le spectateur dans un univers où le présent, le passé et le futur semblent s’entremêler de manière troublante.
Dès le début, le spectateur est immergé dans une atmosphère de tension palpable, accentuée par une utilisation judicieuse et dynamique narrative. Le récit progresse à un rythme haletant alternent entre des moments de calme contemplatif et des séquences d’action intense, ce qui maintient l’attention du spectateur tout au long du film.
Le cadrage joue un rôle crucial dans la création de l’ambiance oppressante du film. Ces plans serrés sur le visage du personnage principale capturent parfaitement son état émotionnel tumultueux, tandis que les larges plans d’ensemble soulignant son isolement dans un monde qui semble étrangement désertique et désolé.
Les sons et la musique contribuent également de manière significative à l’expérience immersive du spectateur. Ces bruits ambiants, tels que le souffle du vent et le bruit de l’eau, renforcent le sentiment d’isolement du personnage, tandis sues la musique évoque une gamme d’émotion, allant de la tension palpable à la mélancolie profonde. En conclusion, Apnées est un court métrage captivant qui utilise brillamment le temps, la dynamique narrative, le cadrage, les sons et la musique pour créer une expérience cinématographique immersive et émotionnellement intense. Nicolas Panay démontre une maîtrise remarquable de son art, offrant au public une œuvre cinématographique aussi stimulante que provocante.
Grand prix de la catégorie lycée professionnels ex-aequo : Pierre Bornand, du Lycée Germaine-Tillion à Thiers (Puy-de-Dôme), pour son texte sur le film Le cri défendu de Charlotte Abramow (photo ci-dessus).
Le titre peut suggérer un cri interdit ou à défendre. Le cri interdit est celui de la femme dans la voiture qui à des bleus et saigne du nez. Elle pleure mais ne crie pas : c’est une souffrance intérieure. Cependant la serveuse prend la défense de cette femme agressée par son mari devant leur fillette qui assiste à la scène d’horreur.
Dans le film, il y a différentes ambiances, avec des couleurs chaudes et froides. Chaudes, à l’intérieur du fast-food qui est accueillant et chaleureux. Beaucoup de rose et de rouge et la marque “Burger Queen” font référence aux femmes. Les couleurs froides peuvent nous rendre mal à l’aise. Elles se trouvent à l’extérieur du fast-food et dans la voiture, là où se déroule la scène de violence. Le jeu des acteurs est réaliste grâce aux expressions du visage filmées surtout de face et en gros plan. De plus, la détermination de la serveuse est soutenue par la bande son dont le rythme et le volume s’intensifient lorsque la serveuse sort du fast-food et se confronte à l’agresseur.
Grâce à cela, durant le film on a pu ressentir plusieurs émotions comme de la compassion pour la femme qui se fait battre et pour la fillette qui observe, de la colère contre l’agresseur qui bat sa femme, et de la fierté pour la serveuse qui défend la victime, même si ses pulsions meurtrières que l’on ressent lorsqu’elle écrase le hamburger “bien saignant” qui représente l’homme, peuvent choquer. Mais cette colère n’est-elle pas légitime ?
Les critiques sont aussi à visionner, lues par celles et ceux qui les ont rédigées, en version vidéo sur le site de Sauve qui peut le court métrage. Y figurent aussi les critiques vidéo récompensées dans cette la dite catégorie, dont le Grand prix décerné à Marianne Chahid-Fryszman, du Lycée Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand, à propos du film National Anthem de Jack Turits (compétition nationale, photo ci-dessus).
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