Le dernier été de leur jeunesse : Il pleut dans la maison
Remarqué (et primé) lors de la Semaine de la critique 2023, le premier long métrage de fiction de la jeune réalisatrice belge Paloma Sermon-Daï est sorti ce mercredi au cinéma. Il convient de ne surtout pas le rater !
Le lien du court au long métrage est évident et éclatant, dans le parcours de Paloma Sermon-Daï, entre Makenzy, son film de fin d’études de la Haute École libre de Bruxelles, sélectionné à Visions du Réel en 2017, et Il pleut dans la maison. Le même personnage se trouve au centre des deux films, à savoir cet ado éponyme à l’étrange prénom anglo-saxon, que l’on retrouve donc sur le registre de la fiction dans ce long métrage dont il partage l’affiche avec sa propre demi-sœur, Purdey Lombet (elle-même fille du demi-frère de la réalisatrice !). Fiction, donc, mais teintée d’un fort parfum d’authenticité, conséquemment…
Makenzy et Purdey grandissent en l’absence de leur mère, qui les abandonne dès que possible pour telle ou telle aventure amoureuse, et ont appris à se débrouiller eux-mêmes. Purdey, dix-sept ans, travaille comme femme de chambre dans un complexe hôtelier et a un petit ami qui, d’origine marocaine, la cache à sa famille ; Makenzy, quinze ans, traîne avec les potes et œuvre surtout dans le vol des vélos des touristes du coin. En cet été wallon caniculaire, c’est la fin de quelque chose qui se profile, pour eux la nécessaire entrée dans l’âge adulte, qui se traduira par la violence pour le jeune homme à l’occasion d’une rencontre hasardeuse sur la plage.
Cette scène – porteuse de la frustration sociale de se voir confronté d’un coup à une classe fortunée et très éloignée de ses préoccupations quotidiennes – ancre le film dans un naturalisme frontal et même brutal, qui évoque forcément une tradition du cinéma belge contemporain, mais Paloma Sermon-Daï n’apparaît pas seulement comme une émule des Dardenne, trouvant sa propre expression de récit – sur une durée réduite à une heure vingt – et de mise en scène.
La jeune réalisatrice, née en 1993, revendique “poursuivre l’exploration d’un territoire - géographique et sociologique” qu’elle connaît bien, le trouvant en outre “trop peu représenté au cinéma”, et l’expérience documentaire de Petit Samedi (2020, lauréat du Magritte du meilleur documentaire), y était aussi reliée. C’est un cinéma palpitant et passionnant qui se cristallise ainsi, avec sans doute la promesse de retrouver Makenzy et Purdey dans le futur, à des âges différents.
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