En salles 17/01/2025

Brûle le sang : vendetta géorgienne à Nice

Le premier long métrage d’Akaki Popkhadze sera distribué par ARP Sélection à partir du mercredi 22 janvier. L’un de nos rédacteurs l’a vu et, au-delà de ses réserves sur le film, revient sur le parcours intéressant du court au long de son auteur.

Brûle le sang, premier long métrage du Géorgien Akaki Popkhadze, affiche d’entrée son objectif : planter un polar musclé dans un Nice méconnaissable. Un chauffeur d’origine géorgienne se fait abattre à la place du d’un oligarque russe. Qui a tué ? Qui était le Russe ? De là une vendetta portée par les fils, deux frères blessés que tout oppose ou presque. Le sage (Florent Hill) qui souhaite devenir curé ; le trublion (Nicolas Duvauchelle) qui revient de loin après avoir été excommunié par les siens.


© Ad Astra Films.

Malgré le beau titre, les muscles gonflés, la peau tatouée, l’huile dans les flingues et les moteurs qui ne cessent de chauffer, ce scénario de vengeance manque sa cible sur le temps long. On retrouve néanmoins cette atmosphère (religieuse, familiale, voyou, bestiale…) du monde souterrain, un peu sale et complexe, croisée dans les courts métrages de l’auteur et cinéaste, mais le côté binaire affecte l’ensemble. Et puis des velléités d’en “mettre plein la vue” à travers toutes sortes de mouvements de caméra produisent, à contre-emploi… de la déconcentration.

 
© Jean-Louis Paris.

Avant ce film, Popkhadze avait réalisé une série de films courts, tous très prometteurs. Le soleil des nuits blanches (film d’école de l’ESRA, 2017), dans lequel on découvre le tout jeune Florent Hill, hyper talentueux dans le rôle du mauvais frère, irresponsable et sanguin. Ce tout premier film enchaîne une série de plans séquences intenses, secs et bien ciselés. Produit par Wolfilms, Je vois (2019), le deuxième court de Popkhadze, remet en scène Hill. Il porte cette fois la veste du mauvais garçon, de la petite frappe dévoyée qui, de retour chez lui à l’aube, un dimanche, va affronter les foudres de sa mère, puis se transformer en infirmier involontaire, exemplaire, auprès de sa grand-mère.

Une belle chronique de la lose et des bas-fonds gonflée au souffle de la rédemption. Ce film de guerre, de cette guerre que l’on mène au quotidien, est à chaque plan une course-contre-la-vie hantée par le silence de la mort.

Avec son troisième court métrage, Ici en silence tout hurle, produit en 2023 par Piano Sano Films (photo ci-dessus), le réalisateur nous emmène en Géorgie. Retour au pays natal pour dessiner un conte enneigé, film sérieux, à résonance sans aucun doute intime, mais dont la dramaturgie semble à s’y méprendre épouser une structure plus grande : celle de la tragédie, des récits inspirés par la mythologie.

Ce film d’atmosphère, entièrement silencieux mais pas poseur, hors du temps, ténébreux, relate dans un paysage rural, ancestral, hyper patriarcal, une histoire d’amour interdite, impossible. Une histoire d’hommes (encore), mais une histoire qui fait peu à peu place aux cœurs et aux mystères de ce qui les guide et les partage : la loi et le désir.

Donald James

À lire aussi :

Ici en silence tout hurle récompensé au Festival européen du film court de Nice en 2024.

- Du court au long : Vingt dieux de Louise Courvoisier.