Extrait
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Quatorze ans

Barbara Carlotti

2019 - 25 minutes

France - Fiction

Production : Ecce Films

synopsis

Été 1988 en Corse, Vanina, une adolescente de quatorze ans, fait les quatre cents coups avec sa cousine et sa grande sœur de seize ans. Les adolescentes sortent en cachette pour aller danser et retrouver des garçons dans l’unique discothèque alentour.

Barbara Carlotti

Né en 1974 à Clamart (Hauts-de-Seine), Barbara Carlotti est auteure-compositrice-interprète et musicienne, ayant étudié le chant lyrique au Conservatoire d'Issy-les-Moulineaux. Elle s'est imposée dans le paysage de la pop française au gré de six albums enregistrés depuis 2005 : ChansonsLes lys brisésL’idéalL’amour, l'argent, le ventMagnétique et Île d’amour. Elle a été doublement nommée en 2012 aux Victoires de la musique, dans la catégorie de la meilleure révélation scène et du meilleur album. 

Elle aura collaboré en outre avec Dominique A., Bertrand Belin, Bertrand Burgalat, Michel Delpech, Philippe Katerine, Izïa Higelin ou encore Olivier Libaux, etc.

Du côté du cinéma, elle est apparue comme danseuse dans Mods de Serge Bozon en 2003, avant de chanter et danser dans L'Italie d'Arnold Pasquier en 2012. En 2014, elle fait l'expérience de la réalisation à travers Quatorze ans, un court métrage produit par Ecce Films et qu'elle tourne en Corse, d'où elle tire ses origines paternelles. Le film, une comédie musicale, s'inscrit dans l'annuelle “Collection” alors lancée par les Programmes Courts et création de Canal+.

On l'a aussi vue en 2021 dans le moyen métrage Planète X de Maxence Vassilyevitch.

Critique

J’avais quatorze ans et c’était l’été, j’avais quatorze ans, je voulais danser.” En 2020, après l’avoir chanté, Barbara Carlotti donnait un nouvel élan à sa chanson Quatorze ans, extraite de son album L’amour, l’argent, le vent (2012), et ce sous la forme d’un film court, son premier. Dans cet hymne à la fête et à la désobéissance adolescente, la chanteuse se souvient de ses années 1980, des cheveux crêpés de ses copines, des jeans moulants, des t-shirts blancs, du maquillage à foison, des stroboscopes planqués dans le ciel des night-clubs, mais aussi et surtout de la joie qui émancipe, du goût du secret et de l’effet gargarisant de la transgression. Son film est à l’image de ces souvenirs, c’est-à-dire moins animé par le souci d’une reconstitution maniaque qu’attentif aux silhouettes, aux allures et aux vêtements qui font l’identité d’une personne et le signe d’une époque.

De la chanson au film, que reste-t-il de cet entêtant refrain ? D’abord une inspiration commune, puisque Quatorze ans est une comédie musicale. Nous sommes en 1988, en Corse, cette “île d’amour”, du nom de l’un de ses albums qui reprend des chansons corses des années 1960-70, et où Barbara Carlotti, née d’un père corse, a passé une grande partie de son enfance. Vanina, quatorze ans, sa cousine et sa grande sœur comptent bien, la nuit venue, sortir, s’extraire de l’autorité parentale, s’échapper de tout ce que leur interdit leur jeune âge. Chorégraphiées et chantées à trois voix, les chansons de Barbara Carlotti entonnées par la bande de filles sont ici comme des cris de ralliement, le signe d’une appartenance ou encore le son d’une révolte joyeuse.

Quatorze ans est fait du charme invariable, intemporel de ces films où il est toujours plus simple de dire les choses, qui paraissent toujours futiles et sont en réalité très profondes, en les chantant. Il est aussi fait de la saveur de ces premiers étés où les rites initiatiques, les découvertes et les premières fois se bousculent, et il porte en lui la sensation de cette moiteur de la nuit venue, nuit tant attendue et rêvée. Le rêve, justement, Barbara Carlotti se tient à son entrée tant elle filme avec soin et délicatesse ces instants noctambules comme l’apparition, pour les yeux de notre jeune trio, d’un monde nouveau aux formes et aux perspectives si proches du réel et en même temps totalement réinventées. Scindé en deux parties, Quatorze ans s’abandonne dans son dernier morceau à un mouvement plus incertain que celui du coming of age inscrit dans son premier segment. La rencontre entre Vanina et un jeune dandy mène le film vers un ailleurs ouaté et incertain. Là, amour, sexualité et substances psychotropes forment un horizon inconnu pour la jeune protagoniste et observatrice, dont la lucidité ne vacille jamais. C’est peut-être la plus belle idée du film que d’envisager ce moment transitoire de la vie, circonscrit à un âge et à une période très précise, comme un moment un peu déréalisé qui abolit les hiérarchies et les distinctions entre la réalité et le rêve, entre l’amour et l’amitié, entre les normes de genre et les orientations sexuelles. Pour approcher, à la fin, un peu de ce que contient le mot liberté.

Marilou Duponchel

Réalisation, scénario et musique originale : Barbara Carlotti. Image : Thomas Letellier. Montage : Michel Klochendler. Son : Julien Brossier, Ange Hubert et Xavier ThieulinInterprétation : Théoline Lanckriet, Jeanne Patronik, Marilou Lopes-Benites, Mikaël-Don Giancarli, Mickaël Migliorini et Nadja Marie-Lessard. Production : Ecce Films.

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