Extrait
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Jusqu’à l’os

Sébastien Betbeder

2019 - 31 minutes

France - Fiction

Production : Envie de Tempête Productions

synopsis

Thomas, pigiste au “Courrier picard”, doit faire le portrait d’Usé, musicien atypique et ancien candidat à l’élection municipale d’Amiens. Tandis que les deux hommes apprennent à mieux se connaître, ils découvrent, dans un terrain vague, le corps inanimé de Jojo. Lorsque ce dernier ressuscite sous leurs yeux, leurs existences se trouvent bouleversées.

Sébastien Betbeder

Né en 1975 à Pau (Pyrénées-Atlantiques), Sébastien Betbeder intègre, après des études aux Beaux-arts de Bordeaux, le Studio national des arts contemporains du Fresnoy.

Il réalise ensuite plusieurs courts métrages (Les mains d’Andréa, Nu devant un fantôme), puis un premier long d’inspiration fantastique, Nuage, qui est présenté au Festival de Locarno et sort en salles en 2007. Suivent Les nuits avec Théodore (sélectionné à Toronto, Prix Fipresci au Festival de San Francisco) et 2 automnes 3 hivers (présenté par l’ACID au festival de Cannes 2013 et Prix spécial du jury au Festival de Turin), une dramédie qui suit le parcours de trentenaires en prise avec les préoccupations de l’époque.

En 2014, Inupiluk reçoit le Prix Jean-Vigo du court métrage et le Prix du public au Festival de Clermont-Ferrand). Suivi par Le film que nous tournerons au Groenland, il compose une trilogie dont Le voyage au Groenland constitue le dernier volet. Présenté pour la première fois à Cannes en mai 2016, au sein de la programmation de l’ACID, il s’est vu décerner une mention spéciale du jury au Festival international du film francophone de Namur. Sébastien Betbeder écrit également e,n parallèle des fictions radiophoniques pour France Culture.

En 2016, il réalise Marie et les naufragés, interprété par Pierre Rochefort, Éric Cantona et Vimala Pons. La même année sort un autre long métrage : Le voyage au Groenland (2016). Ulysse & Mona et Debout sur la montage sont ensuite tous deux dsitribués en 2019.

Sébastien Betbeder fait alors son retour au format court avec Jusqu'à l'os. Ce film, sélectionné dans de nombreux festivals, sert de base à Tout fout le camp, long métrage à l'affiche au cinéma à la rentrée 2022.

Entretemps, le réalisateur aura achevé Planète triste, un moyen métrage présenté à Clermont-Ferrand et à Brive. Dans un format similaire, Mimi de Douarnenez suit en 2023, avec le même succès, tandis que son réalisateur se tourne à nouveau vers le long métrage, à travers L'incroyable femme des neiges, tourné au printemps 2024 dans le Haut-Doubs et au Groenland – et interprété par Blanche Gardin, Philippe Katerine et Bastien Bouillon.

Critique

“Trempés jusqu’à l’os” : l’expression décrit bien l’intensité avec laquelle vivent les deux protagonistes du film de Sébastien Betbeder, capables d’aller boire un verre ensemble juste après un lavage d’estomac. La rencontre entre Usé (Nicolas Belvalette), musicien fantasque et ancien candidat aux élections municipales d’Amiens, et Thomas (Thomas Scimeca), journaliste au Courrier picard, débute pourtant sous de mauvais auspices. Thomas arrive en retard au rendez-vous et commence par mentir à son interlocuteur, dont il doit réaliser le portrait. Usé, rétif à l’interview, renverse quant à lui les rôles en posant des questions au rédacteur qu’il va littéralement mener en bateau dans le site naturel des Hortillonnages. Le montage, qui alterne abruptement les plans sur leurs visages et sur la ville, le tremblement de la caméra portée, les ruptures de volume sonore ainsi que la musique répétitive et grinçante, placent d’emblée le film sous le signe du chaos.

Une série de rapprochements s’esquisse toutefois bientôt entre eux deux : un mensonge réciproque (Usé cache son allergie aux moules et Thomas sa peur de l’eau) trahit une douceur commune des personnages, prêts à se mettre en danger plutôt que d’incommoder l’autre. L’expérience d’un miracle à travers la résurrection de Jojo (Jonathan Capdevielle), dans une véritable parodie de film d’horreur, achève de les réunir. D’abord séparés par les champs/contre-champs ou les panoramiques glissant d’un visage à l’autre, les deux hommes sont enfin rassemblés dans le même plan. Leur ressemblance est alors évidente tant sur le plan physique (ils ont tous deux une coupe de cheveux mi-longue et un nez imposant) qu’émotionnel. Partageant un même désespoir qu’ils noient aussi bien dans l’alcool que dans la musique, ils semblent en effet trouver l’un chez l’autre un nouveau remède contre la tristesse. C’est sur cette ligne de crête entre la noirceur de la mort et des mélodies d’un côté et la rencontre lumineuse entre deux êtres, ponctuée par un humour absurde, de l’autre que le film trouve sa singularité. La profonde humanité qui se dégage de ces personnages en quête d’amour dessine un autre horizon politique, fondé sur la douceur et la sensibilité (à l’image du “Parti sensible” fondé par Usé), laissant espérer un monde meilleur.

Chloé Cavillier

Réalisation et scénario : Sébastien Betbeder. Image : Romain Le Bonniec. Montage : Céline Canard. Son : François Boudet. Musique originale : Usé. Interprétation : Thomas Scimeca, Nicolas Belvalette, Jonathan Capdevielle et Alma Jodorowsky. Production : Envie de Tempête Productions.

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