Web et TV 27/04/2021

Qui vive, en accès libre sur KuB

La plateforme bretonne KuB propose depuis peu son premier long métrage de fiction, Qui vive de Marianne Tardieu. Lequel nous avait pas mal plu lors de sa sortie en 2014.

KuB, édité par l’association Breizh Créative, accueille donc pour la première fois un long métrage de fiction en accès gratuit pour tous. Il s’agit de Qui vive, le premier long métrage de Marianne Tardieu, qui avait été distribué par Rezo Films en novembre 2014. Interprété par Reda Kateb et Adèle Exarchopoulos, il avait été tourné en majeure partie en banlieue rennaise, d’où le lien direct avec la plateforme KulturBretagne, de son nom complet.

Pour l’occasion, nous publions à nouveau le texte qui s’inscrivit alors dans notre rubrique “Premiers pas”, revenant sur le travail préalable de la réalisatrice sur le format court :

Si on associe spontanément le nom de Marianne Tardieu à un seul court métrage, Les gueules noires, qu’elle coréalisa en 2007 (on y reviendra), force est de constater que la réalisatrice de Qui vive ne s’est jamais tenue bien loin de cinéastes qu’on a aimé suivre ou dont on a apprécié les films. Coscénariste pour Vincent Vizioz (sur l’étonnant Rocaille ou sur l’émouvant Tremblay-en France, Grand prix clermontois en 2011), directrice de la photographie sur le long métrage Rue des Cités de Carine May et Hakim Zouhani et sur le grand succès du court métrage 2012, Fais croquer de Yassine Qnia, Marianne Tardieu revient donc, sept ans après Les gueules noires, à la mise en scène avec un long métrage remarquable présenté à l’ACID, à Cannes, cette année (en 2014, ndlr).

Qui vive, indéniablement porté par un Reda Kateb aussi gracieux qu’émouvant, échappe au cahier des charges du film dit “de banlieue” tout en assumant quelques invariants inévitables qui, toujours, devant la caméra de Marianne Tardieu, échappent au cliché. Cet heureux décalage, cette manière de revisiter des lieux et des cités mille fois arpentés, croit-on, par le jeune cinéma français, proviennent à la fois d’un personnage que le scénario ne condamne jamais au nom d’un déterminisme social faisant souvent office de béquille dramaturgique et d’une tendance à l’épure et à la vitesse ne favorisant jamais la tentation du pathos. Qui vive, malgré son sujet grave et son noir tournant à mi-course, demeure ainsi – grâce à son personnage principal – un film toujours alerte, parfois lumineux et, de manière plus inattendue, raisonnablement optimiste.

On ne sait pas quel furent les apports respectifs de Marianne Tardieu et de son coréalisateur, Rodolphe Bertrand, pour Les gueules noires, mais on tirera assurément profit de la redécouverte de ce vibrant moyen métrage également produit par la société de production La Vie est belle et au générique duquel apparaissaient déjà l’acteur Serge Renko et certains techniciens présents au générique de Qui vive. Dans Les gueules noires, beau film mélancolique sur un groupe punk des années 1980 tentant, sous l’impulsion de son leader quinquagénaire, de se reformer pour une tournée que l’on devine perdue d’avance, on sentait déjà une habileté à investir un genre (là, le film sur le rock) sans jamais laisser les clichés qui lui sont inhérents l’emporter. Parce que, plus que le décorum, ce sont les personnages, les trajectoires humaines, qui intéressent principalement Marianne Tardieu. Et c’est là, bel et bien, ce qui distingue Qui vive d’un genre aux contours flous auquel il serait dommage de le cantonner.

Stéphane Kahn

À lire aussi :

- Un autre long métrage des années 2010 avec Reda Kateb : Les derniers Parisiens.