Livres et revues 21/10/2020

Le premier livre en français consacré à l’histoire du stop-motion

En librairie depuis le 17 septembre, “Stop-motion, un autre cinéma d’animation” de Xavier Kawa-Topor et Philippe Moins, édité par Capricci, est une lecture qui tombe à point durant la Fête du cinéma d’animation.

Quiconque n’a pas été subjugué par les squelettes animés par Ray Harryhausen dans Jason et les Argonautes pourra arrêter là la lecture. Ou non. Plutôt acquérir au plus vite ce gros ouvrage entièrement consacré au stop-motion, cette technique d’animation plus que centenaire où le cinéma tutoie l’illusion et la magie.

Donner vie à l’inanimé, tel est le prodige, on le sait, de l’animation image par image, qui ne fait finalement que redoubler ce que le cinéma en prises de vue réelles produit en assemblant des images fixes. Mais la magie du stop-motion réside peut-être, à nos yeux en tout cas, dans le fait, précisément, que l’illusion, ici, se donne à voir. Comme telle. Dans tout son artifice. Les marionnettes y sont des marionnettes, les jouets des jouets. Et l’on comparera avec profit l’effet d’émerveillement généré par les jouets s’animant dans une chambre d’enfant dans Les aventures de Tom Pouce de George Pal puis dans Toy Story de John Lasseter. Indéniablement, quelque chose s’est perdu en route. Quelque chose que d’autres cinéastes contemporains – de Tim Burton à Michel Gondry en passant par Henry Selick – essaient heureusement de perpétuer.

Si l’on pense vite, en matière de stop-motion, aux usages merveilleux qu’en fit le cinéma d’effets spéciaux (de King Kong avec Willis O’Brien à L’empire contre-attaque avec Phil Tippett en passant par la filmographie de Karel Zeman, mettons), il faut préciser que le champ arpenté par ce livre richement illustré excède très largement ce principe d’hybridation auquel tant de minutieux artisans ont apporté leur dextérité.

Le livre de Xavier Kawa-Topor et Philippe Moins est surtout, comme l’indique son sous-titre, une véritable histoire parallèle du cinéma d’animation, trouvant son origine dans les expérimentations de Georges Méliès et allant jusqu’aux films animés “à l’ancienne” de Wes Anderson.

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Aucun continent, aucune période n’y sont oubliés. Du cinéma à la télévision, tous les médias y sont recensés, pointant les singularités de certains pays (de l’école tchèque, avec Jiří Trnka, au regain de la pâte à modeler en Angleterre, avec Aardman). Mais surtout, le livre s’attarde sur de grandes figures du cinéma d’animation, consacrant plusieurs pages précieuses, aussi bien biographiques qu’analytiques, à des maîtres comme Charley Bowers, Ladislas Starewitch, Jan Svankmajer, Barry Purves ou les frères Quay. Autant de noms que nous n’avons cessé d’évoquer, d’artistes que nous avons pu rencontrer parfois dans les pages de Bref depuis 30 ans.

Si certains chapitres s’apparentent un peu trop à un catalogue (ceux sur le court métrage contemporain, notamment) et si l’on regrette que certains films (comme L’invité de Guy Jacques, véritable réflexion sur le procédé même du stop-motion, visuel de bandeau) ne soient que brièvement cités, on relativise vite cette déception mineure en mesurant l’étendue parcourue et en s’avouant aussi qu’il y a là bien des titres, bien des cinéastes, bien des “écoles” que nous ne connaissions pas. Et c’est aussi, là, la grande réussite de cette somme, que de nous donner véritablement envie de découvrir tant de trésors cachés.
 

Stéphane Kahn

 

Stop-motion, un autre cinéma d’animation, de Xavier Kawa-Topor et Philippe Moins, Capricci, 412 pages, 34 euros.
Paru le 17 septembre 2020.

 

À lire aussi :

- La Fête du cinéma d’animation 2020.

Michael Dudok de Wit : le cinéma d’animation sensible, paru chez Capricci en 2019.