En salles 02/06/2022

Des premiers longs venus de Grèce et du Costa Rica

Ce sont vers des coins inhabituels du globe que nous entraînent cette semaine Nathalie Álvarez Mesén et Christos Massalas, tous deux remarqués au préalable grâce à leurs courts métrages.

Le calendrier des sorties voit Broadway de Christos Massalas et Clara Sola de Nathalie Álvarez Mesén apparaître en même temps sur les écrans, en représentants de cinématographies ne figurant pas parmi les plus diffusées d’un point de vue général. Surtout, tous deux sont liés à la Quinzaine des réalisateurs : du premier, on se souvient y avoir vu Copa-Loca, en 2017, tandis que la seconde présentait dans le cadre de cette section, l’an dernier, son premier long.

Avant Copa-Loca, ce représentant de la nouvelle génération de cinéastes grecs avait signé d’autres courts depuis le début des années 2010 et son passage par la London Film School. Un parcours couronné par Broadway (photos ci-dessous), pour lequel il retrouve Elsa Lekakou, sa comédienne de Copa-Loca, pour un film noir inscrit dans un univers queer où une bande de squatteurs d’un ancien théâtre abandonné – dont le nom donne ironiquement son titre au film – s’aimantent, se rapprochent et se déchirent au fil d’une existence chaotique à la marge de la société.

Assez brillamment mise en scène, l’histoire d’amour passionnée et atypique entre Nelly et Jonas – qui a aussi une facette féminine, celle d’une longiligne danseuse surnommée Barbara – manque paradoxalement de chair et il n’est pas toujours aisé de s’attacher à ces personnages se posant souvent en reflet au cinéma d’Almodóvar, première période surtout, parmi d’autres références cinéphiles directes (voir le verre de lait potentiellement toxique citant le Soupçons d’Hitchcock).

Clara Sola, de Nathalie Álvarez Mesén (photos de bandeau et ci-dessous), entretient moins de liens évidents avec tel ou tel univers cinématographique, mais s’inscrit tout de même dans un paysage latino-américain plutôt identifiable lui aussi, entre chronique sociale et univers fantasmagorique, nimbé de croyances religieuses et de superstitions rurales. Car le scénario s’enracine dans la campagne costaricienne, dans les pas d’une quadragénaire affublé d’un handicap physique et infantilisée par sa mère, mais qui semble dotée de pouvoirs surnaturels aux yeux de la communauté de paysans des environs.

Le portrait est souvent touchant, Clara ne rêvant que de sortir de sa solitude – “sola” est son attribut – et assouvir ses désirs profonds, attisés par les novelas regardés au quotidien et témoignant de l’existence d’un autre monde, inaccessible, quelque part.

Également suédoise de nationalité, la réalisatrice avait tourné en Scandinavie ou aux États-Unis plusieurs films courts, dont Släppa taget (2016) et Molt (2018). Elle est déjà engagée sur le développement d’un second long, il est à fort à parier que son nom reviendra désormais régulièrement dans les sélections des grands festivals internationaux.

Christophe Chauville

À lire aussi :

- Sur la Quinzaine des réalisateurs 2017.

- Une autre figure majeure du nouveau cinéma grec : Vassili Kekatos (La distance entre le ciel et nous).