2014 - 23 minutes
France - Fiction
Production : Kidam
synopsis
Pyrénées, vallée d’Ossau, 1957. Pierre arrive sur l’estive avec son chien et son troupeau de brebis. Il craint la menace du loup et ne se doute pas de celle, plus sourde mais plus féroce, que représente le peloton de parachutistes sur lequel l’armée effectue des tests secrets.
biographie
Vincent Paronnaud
Né en 1970 à la Rochelle, Vincent Paronnaud, alias Winshluss, est auteur de bandes dessinées (son Pinocchio a reçu le prix du meilleur album au Festival de la BD d'Angoulême en 2009) et cinéaste. Il a coréalisé deux longs métrages avec Marjane Satrapi (Persépolis, 2007, Prix du jury du Festival de Cannes 2007 et César du meilleur premier film et de la meilleure adaptation 2008 ; Poulet aux prunes, 2011).
Du côté du court métrage, en 2003, il commence par la coréalisation avec Lyonel Mathieu, alias Cizo, de Raging Blues, O’Boy, What Nice Legs ! et Hollywood Superstars avec Mr Ferraille, un faux documentaire. En 2009, il s’attèle à la réalisation de son premier long métrage solo, en prise de vues réelles, Villemolle 81, parodie zombiesque en milieu rural.
Entre 2010 et 2014, il revient au court métrage en animation avec Il était une fois l’huile, une satire de la société de consommation, puis en prise de vues réelles avec le terrifiant Territoire. Smart Monkey est ensuite coréalisé avec Nicolas Pawlowski.
En 2017, Paronnaud s'associe cette fois à Denis Walgenwitz pour la réalisation du court métrage d'animation La Mort, père & fils, récompensé du Prix du jury junior au Festival du film d'animation d'Annecy en 2018 et nommé au César dans la catégorie animation en 2019.
Il se lance alors dans un long métrage en prises de vue réelles, de genre fantastique : Hunted. Interprété notamment par les Wallons Lucie Debay et Arieh Worthalter, le film est présenté à L'Étrange festival en 2020 sans toutefois sortir en salles en France.
Le réalisateur revient ensuite à l'animation par le biais d'Angelo dans la forêt mystérieuse, sélectionné en compétition des longs métrages au Festival d'Annecy 2024. Le film est adapté de l'un de ses propres albums de BD, primé au Salon du livre pour la jeunesse de Montreuil en 2016.
Critique
Auteur, sous le nom de Winshluss, de bandes dessinées réputées, coréalisateur de deux longs métrages avec Marjane Satrapi, Persépolis et Poulet aux prunes, Vincent Paronnaud a réalisé quelques films en solo sur le mode du pastiche, comme Hollywood superstars avec Mr Ferraille – La biographie non-autorisée de Monsieur Ferraille (2003), faux documentaire, Villemolle 81, une histoire de zombies dont le teaser prévient “Dans le Tarn, personne ne vous entendra crier”, et Il était une fois l'huile (2010), sur le ton d'une animation de propagande.
Si Territoire confirme le regard acerbe que l'œuvre de Paronnaud porte sur l'humanité, on sent, dans ce film d'horreur qui a pour théâtre les montagnes pyrénéennes, la volonté de se confronter aux codes d'un genre sans la distance de la parodie. Une expérience scientifique concoctée par les autorités politiques et dont les effets leur échappent, des personnages tués par des créatures non humaines, un couple de jeunes touristes naïfs et innocents, des poursuites, le moment de refuge dans une maison assaillie par les monstres, le happy end aux accents amers, constituent les ingrédients d'une formule bien identifiée, que Paronnaud réinterprète aux couleurs de l'Hexagone. Car l'histoire est strictement localisée, “Pyrénées 1957”, pour que nous fassions clairement le lien entre ces militaires français parachutés pour se livrer à un entraînement pour le moins particulier, et la guerre d'Algérie – 1957 est ainsi l'année de la Bataille d'Alger.
Le contrepoids à la fiction horrifique est incarné par un berger taiseux qui communique en sifflant avec un autre pâtre, au milieu de son troupeau, dans une vallée en contrebas. Le recours à cette langue sifflée aujourd'hui éteinte ajoute une couleur ethnographique au tableau bucolique dans lequel les premiers moments du film nous installent : la majesté du paysage, le troupeau dans la nature, l'abri de fortune construit par le berger, le fromage qu'il fait de façon pour le moins artisanale. Si ce traitement naturaliste permet de mieux nous surprendre quand la fiction bascule dans l'horreur, la greffe avec les conventions du genre touche peut-être à ses limites dans la scène du refuge assailli et ce moment apparaît proche du pastiche.
Il est vrai que les frontières sont ténues, tant un des charmes du film de genre est aussi de susciter le rire quand il joue dans la surenchère de membres déchiquetés et d'éclaboussements d'hémoglobine. Et là, Paronnaud s'en donne à cœur joie.
Jacques Kermabon
Article paru dans Bref n°115, 2015.
Réalisation : Vincent Paronnaud. Scénario : Léa Pernollet et Vincent Paronnaud. Image : Alfredo Altamirano. Montage : Baxter, François Nabos et Vincent Paronnaud. Son : Marc Pichelin, Laurent Sassi et Vincent Villa. Musique originale : Olivier Bernet. Interprétation : Jean-Marc Desmond, Lucie Debay, Joffrey Verbuggen et François Legrand. Production : Kidam.