Extrait

Sœur et frère

Marie Vieillevie

2012 - 4 minutes

Animation

Production : La Poudrière, école du film d’animation

synopsis

Une jeune fille vit une relation très complice avec son frère aîné.

Marie Vieillevie

Née en 1983, Marie Vieillevie, alias Mary Oldlife, est sortie diplômée de l'ESAG Penninghen à Paris avec un film de fin d'études intitulé Welcome to White Chapel District (Prix du jury junior au Festival d'Annecy en 2007). Elle a travaillé durant quatre ans dans différents studios et agences de communication comme graphiste ou directrice artistique avant de reprendre ses études à l'école de La Poudrière. Elle y a réalisé Eau vive (film d'une minute), La cour des grands (film de commande pour Canal J) et Sœur et frère, son film de fin d'études en 2012.

Elle a collabore ensuite à divers projets en tant qu'animatrice, par exemple les clips Don't Care de Lou Marco et Wonderland de Caravan Palace, ou encore le court métrage de Tibor Banoczky et Sarolta Szabo Leftover (2014).

En tant que réalisatrice, elle signe Sweet Winter avec Hugo Bravo, avant de connaître un beau succès en solo grâce à Kaminhu, produit par Les Astronautes et sélectionné dans de nombreux festivals en France (Annecy, Arles, Auch, Clermont-Ferrand, Dijon, Grenoble, Lille, Paris Courts devant, Rennes, Roanne…) et à l'étranger (Bristol, Bucheon, Espinho, Hong Kong, Namur, Palm Springs, Tokyo… Il a également fait partie de la sélection officielle pour le César 2025 du César du court métrage d'animation.

Marie Vieillevie a en outre été première assistante réalisatrice sur le long métrage de Rémi Chayé Tout en haut du monde, sorti en 2016. Elle assure en outre du développement graphique pour des longs ou des documentaires animés.

On pourra retrouver davantage d'informations sur son site personnel.

Critique

En choisissant en 2012 le titre de son film de fin d’études à la Poudrière, Marie Vieillevie a inversé l’ordre traditionnel des mots désignant la fratrie, attirant ainsi l’attention sur le personnage féminin, la sœur, dont on partage le point de vue. À l’image de ce subtil détail, la mise en scène se déploie avec beaucoup de délicatesse pour raconter la découverte de la sensualité et de la sexualité à l’âge adolescent. Cette délicatesse caractérise également le graphisme – si l’atmosphère balnéaire et estivale est encore une fois le cadre idéal pour narrer ces premiers émois, elle existe ici de manière très stylisée, représentée avec la même approche suggestive que celle qui a guidé l’écriture du scénario. La mer, très présente au son, apparaît en effet à l’image comme un espace presque immaculé, se confondant avec celui du ciel ou du sable, telle une page blanche sur laquelle viennent se poser des formes de couleur au rendu aquarellé.

Dans cet univers visuel aux teintes plutôt pâles et douces se détachent quelques éléments susceptibles de provoquer le désir et la transgression : les chevelures rousses de la sœur et du frère, le maillot du jeune homme qu’il rencontre, les braises des cigarettes partagées dans l’obscurité. Ce moment clandestin en précède un autre, lorsque le désir qui circule dans le trio s’épanouit d’une manière inattendue pour la jeune fille. Avec subtilité encore, la réalisatrice nous montre les corps des deux garçons cachés par une barque retournée flottant sur l’eau et leur étreinte, vue par le personnage féminin. Nous ne pouvons voir les visages des adolescents et leur baiser supposé, mais le très gros plan sur le regard de la jeune fille nous fait partager son saisissement.

Dans le dernier court métrage en date réalisé par Marie Vieillevie, Kaminhu (2023), la cinéaste raconte également une rencontre sensuelle, où l’évidence de l’attraction entre deux êtres se heurte bientôt à la complexité du monde. L’aventure amoureuse se clôt alors avec une certaine brutalité, laissant les protagonistes désemparés, submergés par l’ambivalence des sentiments et des émotions. On ressent le même trouble dans le dernier plan, en suspens, de Sœur et frère : un monde inconnu, celui d’un autre âge peut-être, semble s’ouvrir pour les personnages et, avec lui, une brèche dans la complicité enfantine qui les unissait.

Anne-Sophie Lepicard

Réalisation et scénario : Marie Vieillevie. Animation : Marie Vieillevie et Jérémie Moreau. Montage : Catherine Aladenise. Son et musique originale : Christophe Héral. Voix : Emma Charbonnier, Timothé de Bouville, Victor Léonard, Marie Moulin et Chloé Parra. Production : La Poudrière, école du film d'animation. 

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