Extrait
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Moul lkelb (L’homme au chien)

Kamal Lazraq

2014 - 28 minutes

France - Fiction

Production : Barney Production

synopsis

Youssef mène une vie recluse et marginale. Son seul ami est son chien Chagadai. Un soir à la plage, le chien disparait. Pour le retrouver, Youssef est contraint de s’embarquer dans une quête dangereuse à travers les bas-fonds de Casablanca.

Kamal Lazraq

Né à Casablanca en 1984, Kamal Lazraq sort diplômé en 2011 du département réalisation de la Fémis, à Paris. Il y aura signé Derrière les murs (2009) et Les yeux baissés (2010), tandis que son court métrage de fin d'études, Drari, reçoit la même année le deuxième prix de la Cinéfondation au Festival de Cannes et le Grand prix du court métrage au Festival Entrevues de Belfort.

Moul lkelbL'homme au chien rencontre un succès semblable en 2015, se voyant projeté, entre autres, en compétition internationale au Festival de Clermont-Ferrand et au Brussels Short Film Festival. Il reçoit en outre le Grand prix au festival “Un poing, c’est court” de Vaulx-en-Velin et le Grand prix du Festival de Nice “Un festival, c'est trop court !”.

Son premier long métrage, Les meutes, tourné dans sa ville natale et à nouveau produit par Barney Production, est présenté dans la section Un certain regard du Festival de Cannes 2023.

Critique

Pour interroger un caïd sur la disparition de son chien, Youssef descend l’escalier en colimaçon qui mène au sous-sol d’un club. Ce mouvement correspond à la trajectoire du film, plongée dans les milieux nocturnes et violents de Casablanca. L’homme au chien prend sans conteste pour matrice le cinéma néoréaliste, empruntant autant son esthétique de la visite guidée que le prétexte scénaristique de la recherche d’un chien supposément volé pour partir à la rencontre de figures des quartiers mal famés, que Kamal Lazraq a dénichées grâce à un spécialiste du casting sauvage. Ces hommes de la pègre ou des combats de chiens, interprètent leur propre rôle et s’expriment dans la langue mouvante et très locale qu’est l’arabe dialectal.

Le scenario, co-écrit avec le comédien principal, qui a vécu une mésaventure similaire, prend pour point de départ la disparition sur la plage de l’animal de compagnie de Youssef. Par l’ellipse de la baignade, le soleil éclatant devient lumière crépusculaire. Dans ce raccord, on passe de la présence à l’absence du chien, mais aussi de l’endroit d’une société́ – le lieu public fréquenté en plein jour – à son envers – les milieux nocturnes des ruelles et des sous-sols. La disparition du chien, non montrée, place le spectateur au même niveau de savoir que le personnage et cette égalité de regard sert de principe à la visite des quartiers mal famés de la ville, découverte autant pour l’un que pour l’autre.

“Tous des chiens”, grogne le patron du club à Youssef. Dans la traversée des lieux, se joue aussi la rencontre d’une bestialité latente, où les chiens, comme ceux qui les dressent, sont en cage, montrent les dents et risquent de finir décapités. En renforçant la marginalité de Youssef, qui revendique d’avoir pour meilleur ami son chien dans une culture qui ne conçoit pas la domestication de l’animal, L’homme au chien offre un parcours dans des relations de confrontation dont la gradation va de l’agressivité à la violence bestiale.

Raphaëlle Pireyre

Article paru dans Bref n°114, 2015.

Réalisation et scénario : Kamal Lazraq. Image : Laurent Navarri. Montage : Lilian Corbeille. Son : Clément Decaudin, Laurent Blahay et Rémi Bourcereau. Interprétation : Ghali Rtal Bennani, Ghassan El Hakim et Mohamed Fennane. Production : Barney Production.

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