Extrait
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Midnight Kids

Maxence Vassilyevitch

2020 - 23 minutes

France - Documentaire

Production : Le GREC

synopsis

À cinq cent cinquante kilomètres au nord du Cercle polaire, accessible uniquement par avion, Utqiagvik, anciennement Barrow, est la localité d’Alaska la plus septentrionale des États-Unis. De jeunes Inuits, face à la banquise et son horizon claustrophobique, jaillissent sous le soleil de minuit pour faire de leur ville un terrain de jeu.

Maxence Vassilyevitch

Après une licence en arts visuels et cinématographiques obtenue à la Sorbonne Nouvelle (Paris III) et un master en réalisation à la London Film School, Maxence Vassilyevitch a été lauréat 2014 du GREC avec son court métrage Je suis présent, qui met en scène six jeunes gens sur leur lieu de vacances et où apparaissent notamment Alix Bénézech et Marc-Antoine Vaugeois.

Il réalise en 2017 Saranac Lake, produit par Sedna Films, avec le concours de la Région Limousin. En 2018, il rejoint les Ateliers Médicis pour accompagner la réalisation de trois projets filmiques : Les archipels. En 2019, il finalise Midnight Kids, film anniversaire enrtrepris pour les 50 ans du GREC, en partenariat avec France 2.

Il enchaîne avec Planète X, un moyen métrage produit par les Films de la Capitaine et Rectangle Productions, interprété notamment par Jacques Nolot et la chanteuse Barbara Carlotti.

Le scénario de son premier long métrage, Cosmos-zoo, a reçu l'aide à la réécriture du CNC et de la Région Sud.

Critique

Enveloppée par des nappes musicales, la vision des amas d’architectures industrielles aux formes géométriques, des baraquements, des pipelines font planer l’hypothèse d’un monde dystopique baignant dans une humidité poisseuse, collante. La figure humaine semble ici échouée, à l’image de cette épave rouillée gisant depuis bien longtemps en dehors des flots. La science-fiction encore : voilà Mad Max, ou quelque chose comme ça... Un garçon emmitouflé chevauche un quad, il prend la voie de la transgression en empruntant une route interdite. La voix-off qui en émane ne fait pas mystère d’une condition qui renvoie à la survie plus qu’à autre chose. 

Nous sommes aux États-Unis, en Alaska, à plus de 500 kilomètres au nord du cercle polaire. Cette localité s’appelait Barrow, aujourd’hui renommée Utiqagvik, une façon de la rendre au peuple et à la culture inuits. C’est ici qu’était censé se dérouler (tourné en fait en Nouvelle-Zélande !) 30 jours de nuit (2007), jouissif film d’exploitation où une horde de vampires profite de la nuit polaire d’un mois pour décimer la population. Sans faire de comparaison, Midnight Kids retourne l’argument : alors que l’on ose faire respecter un couvre-feu pour la jeunesse d'Utiqagvik, le soleil cesse ici de se coucher pendant de longues semaines... Les prémices se situent dans la veine du documentaire atmosphérique, mais Maxence Vassilyevitch ne reste pas rivé à ce curseur. Il ancre aussi son film dans une trivialité qui transpire l’ennui, le désœuvrement. La transition se fait habilement quand le garçon au quad se ravitaille en essence ; lorsqu’il reprend la route, la caméra reste avec la jeune fille, littéralement plantée à la caisse, tandis que quelques plans fixent le décor intérieur de la station-service. Cette dernière n’a pas le monopole du quotidien morne : voici bientôt la salle de bingo...  

Déjà instaurée lors de l’amorce, la voix-off prolonge un contrepoint formulant les rêves, la fuite, l’évasion. Mais il y a tellement d’horizon ici que ça n’en est plus un ; les aspirations semblent se perdre dans son infinité, comme si l’immensité provoquait, plutôt qu’une ouverture, un enfermement claustrophobique. Midnight Kids fait émerger discrètement les enjeux des populations autochtones, en faisant sonner tout à coup l’Inuplaq, la langue inuite d’Alaska, tandis que l’on se trouve au cimetière – il y a bien sûr un rapport allégorique ici avec la difficile survivance de la culture inuite. Pour la jeunesse, il y a toujours les jeux, forcément dangereux quand la tentation est de les pousser trop loin, et le désœuvrement fait qu’elle est grande. Mais le jeu est aussi une remise en mouvement – le peuple inuit s’était fait sur la base du nomadisme. On s’aventure sur la banquise, on réinvestit le paysage de sa présence. Et si l’horizon infini devenait la promesse du possible. 

Arnaud Hée 

Réalisation et scénario : Maxence Vassilyevitch. Image : Anaïs Ruales Borjat. Montage : Jeanne Sarfati. Son : Maxence Vassilyevitch et Niels Barletta. Musique originale : The Penelopes. Production : Le GREC.

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