Extrait
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Madre

Simón Mesa Soto

2016 - 14 minutes

Colombie, Suède - Fiction

Production : Momento Film, Evidencia Films

synopsis

Andrea, 16 ans, descend de son quartier sur les collines de Medellin pour assister à un casting porno en centre ville.

Simón Mesa Soto

Né à Medellín en 1986, Simón Mesa Soto est un réalisateur colombien.

Après des études de communication audiovisuelle à l’université d’Antioquia, il entre en 2014 à la London Film School. Son film de fin d’étude, Leidi, remporte la Palme d’or 2014 du court métrage au Festival de Cannes.

Son second court métrage Madre (2016), axé sur une jeune adolescente, Andréa, qui se confronte au monde de la pornographie à Medellin, encore, est également présenté en compétition officielle des courts métrages au Festival de Cannes.

Simón Mesa Soto travaille ensuite sur son premier long métrage : Amparo. Le film est sélectionné en compétition à la Semaine de la critique, à Cannes, en 2021, mais demeure inédit dans les salles françaises.

Critique

En 2014, avec Leidi, son tout premier court métrage, le réalisateur colombien Simón Mesa Soto a remporté la Palme d’or au Festival de Cannes. Ce film retrace la journée de Leidi, une adolescente devenue mère très tôt, trop tôt, qui décide de partir à travers les ruelles de Medellín à la recherche du père de son enfant. Dès ce film, Mesa Soto fait montre d’une grande sensibilité. Sa mise en scène subtile, ses cadrages rigoureux, la présence quasi charnelle à l’écran de la ville et de son personnage entêté, cousine de Rosetta, font ce premier métrage une œuvre puissante, des plus prometteuses.

Également sélectionné en compétition à Cannes, Madre (2016) prolonge l’exploration de la figure de l’adolescente à la jeunesse brûlée ayant grandi trop vite. Alors que Leidi était un personnage-moteur, en descendant de sa colline de Medellín, la jeune Andrea va subir, quant à elle, une véritable descente aux enfers. Andrea habite un quartier pauvre dans les hauteurs de Medellín. Pour se faire un peu d’argent, la jeune fille d’à peine seize ans va participer à un casting porno en centre-ville. Si la séquence d’essai restera hors champ, Mesa Soto choisit néanmoins de tourner l’entretien préparatoire aux rapports à venir. Celui-ci occupe une place centrale. Très maquillée et tentant de se faire passer pour plus âgée, Andrea dévoile toutes ses ambitions (matérialistes) qui lui permettraient de vivre heureuse et indépendante. Au cours de cet entretien où l’intervieweur demeure hors champ, on comprend bien que la vraie question n’est pas de savoir si Andrea est majeure, ni si elle va devenir riche, mais si elle va accepter la séquence finale, celle qui fait mal.

Madre est composé de trois parties (avant, pendant, après) au cours desquelles on ressent tout du personnage : sa joie, son exaltation, son trac, sa crainte, son appétit naïf de réussite, et puis son questionnement, son amertume, sa douleur, son mal rentré et silencieux. De la tentative d’envol aux ailes brisées. Madre est surtout construit autour d’un événement que l’on ne verra pas. Il y aurait beaucoup à dire sur l’utilisation du hors champ de ce film. Invisibilité de l’intervieweur et ellipse de l’expérience même. Le hors champ est une manière de travailler dans les creux de l’image et de la fiction tant et si bien que l’on a l’impression de voir des choses qui n’ont pas eu lieu et d’en avoir entendu d’autres qui n’ont pas été dites. L’imagination travaille, la conscience déraille un peu. Mais plus largement le hors champ peut ici s’envisager comme la métaphore des traumas qui scellent des brèches dans le cours de l’adolescence. Il y a eu trauma, mais on ne sait plus lequel, ni quand exactement… Film militant, pédagogique, Madre est parfaitement réussi du point de vue méthodologique, dramaturgique. Comme dans Leidi, on ne cesse de penser au cinéma des frères Dardenne. À ce cinéma épuré qui conjugue sens des dialogues et des silences, acuité du cadre et des valeurs de plan. Sans oublier le choix d’un sujet social poignant, mais individuel et à résonnance universelle. Car on sent bien tout au long de ce Madre qu’Andrea est une adolescente parmi les autres (celles que l’on aperçoit et que l’on imagine à l’arrière-plan).

C’est alors qu’un curieux au fond de la salle s’interroge sur le titre : Madre (mère), mais pourquoi ce titre ? Pour répondre à cette question il faut aller jusqu’au bout du film, garder les yeux ouverts jusqu’au dernier plan. Après ce deuxième court métrage, Simón Mesa Soto a signé Amparo, un long métrage sélectionné à la Semaine de la critique, à Cannes, en 2021 qui raconte l’histoire d’une mère célibataire en lutte pour délivrer son fils adolescent appelé sous les drapeaux.

Donald James

Réalisation et scénario : Simón Mesa Soto. Image : Juan Sarmiento. Montage : Gustavo Vasco. Son : Andres Montaña Duret, Isabel Torres et José Hernán Valenzuela. Interprétation : Yurani Anduquia Cortés, María Camila Maldonado, Paulo de Jesús Barros Sousa et Adriana Maria Salazar. Production : Momento Film et Evidencia Films.

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