Extrait
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Les vacances à Chelles

Martin Jauvat

2019 - 20 minutes

France - Fiction

Production : Ecce Films

synopsis

C’est l’été en banlieue parisienne. Il fait chaud, la ville est déserte. Parfois, on se sent seul quand on reste à la maison pendant l’été, et tout ce dont on rêve, c’est d’un peu de compagnie.

Martin Jauvat

Né en 1995, Martin Jauvat a toujours vécu à Chelles, en Seine-et-Marne (77), mais a étudié les lettres modernes à Paris, après des essais en prépa littéraire, licence d’histoire et licence de cinéma. Il a ensuite passé plusieurs concours d’écoles de cinéma, sans succès.

Sa collaboration avec la société de production Ecce films a démarré alors qu’il se faisait remarquer grâce à des courts métrages tournés dans son jardin avec des amis. Il a successivement réalisé, dans sa ville natale, Les vacances à Chelles (2019), Mozeb (2020), et Le sang de la veine (2021), sélectionnés dans de nombreux festivals (Clermont-Ferrand, Pantin, Trouville, Cabourg, etc.), avant de signer un premier long métrage, Grand Paris, en 2022. Le film fait alors partie de la programmation de l’ACID au Festival de Cannes et sort en salles au printemps 2023.

Martin Jauvat a également été le coscénariste et l’interprète des courts métrages Ville éternelle de Garance Kim (2022) et Sam & Lola de Mahaut Adam (2024). Il revient en 2025 avec un nouveau long, projeté en séance spéciale à la semaine de la critique, à Cannes : Baise-en-ville. Il en tient le premier rôle et y retrouve Sébastien Chassagne, William Lebghil et Anaïde Rozam, tandis qu'Emmanuelle Bercot et Michel Hazanavicius font leur apparition dans son univers.

Critique

Il ne se sera finalement écoulé que six ans – c’est peu – entre la toute première réalisation identifiée de Martin Jauvat et la présentation cannoise, dans le cadre d’une séance spéciale de la Semaine de la critique, de son deuxième long métrage, Baise-en-ville. Avec entretemps, trois autres films courts, dont l’un (Grand Paris Express) est devenu un long (sous un titre amputé du “express”). Cette remarque liminaire n’a pour but que de saluer la créativité prolifique du lascar, concomitante à sa fidélité géographique et thématique avec sa ville d’origine (Chelles, donc, 54 372 habitants au recensement de 2022 selon Wikipédia) et avec les confins de la Grande couronne en général. Il n’est pas anodin de revenir aux germes de ce cinéma avec ce premier film et son premier plan, qui ferait revenir à la mémoire le leitmotiv du Magicien d’Oz : “There’s no place like home”. Le jeune type qu’on découvre s’en fait visiblement le credo, s’installant dans la piscine trônant au mileu de son jardin pour se payer une bonne tranche de farniente chez lui, ce qui vaut bien Acapulco, Bali ou Ibiza. Un sédentarisme qu’on retrouvera souvent dès lors dans le cinéma de Jauvat, s’incarnant notamment par des sessions de jeux vidéo pour des hurluberlus vissés à leur canapé. Lui-même intervient d’ailleurs en tant qu’interprète dans ce premier opus, dérangeant en histrion surexcité le duo qui se cristallise tranquillement entre le vacancier local du début et un gusse rencontré de façon inopinée et assez cavalière, à la suite d’un glaviot mal propulsé. De quoi s’engager dans les pas d’un buddy-movie un peu bancal, le compère ainsi surgi étant lui aussi un drôle de zig, que l’on découvre vite passablement déprimé, sinon suicidaire et prêt à se passer la corde au cou. Avoir un bon copain, c’est ce qu’il y a de meilleur au monde, s’égosillait jadis Henri Garat, et il semble bien que les deux loustics partagent son constat, devenus copains comme cochons, jusqu’à frôler le “co-dodo” – ce qui entraîne le récit vers une possible autre dimension d’attirance non formulée, que Jauvat, matois, laisse infuser à travers des plans triviaux de slibard moulant cadré plein champ ou de pilosité débridée.

Parce que les vacances à la cool à Chelles, c’est la panacée, certes, mais bouger un peu ne fait pas de mal non plus. Et comme les pérégrinations de Grand Paris – ou celles de Ville éternelle, de Garance Kim, coécrit et joué par Jauvat –, le duo va sortir de sa douce léthargie, roulant en Mini sur une route du 77 sacrément baignée de verdure, puisque ce département étrange est à la fois proche de Paris – qui apparaît néanmoins comme un bout du monde, où l’on ne va quasiment jamais – et déjà absolument campagnard. Presque une autre planète, voir ce dernier plan en plongée où les deux gars vautrés dans l’herbe sont comme suspendus en apesanteur dans le cosmos. Rien d’étonnant à ce que des extra-terrestres aient pu, comme dans Le sang de la veine, se pointer là…

Christophe Chauville

Réalisation et scénario : Martin Jauvat. Image : Vincent Peugnet et Vivien Fradin. Montage : Jordan L’Hôte et Martin Jauvat. Son : Florent Tupin. Interprétation : Erwin Aureillan, Sébastien Chassagne, Martin Jauvat et Georges Pillegand. Production : Ecce Films.

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