Extrait

Les météos d’Antoine

Jules Follet

2024 - 27 minutes

France

Production : Superstructure

synopsis

Antoine reprend l’exploitation agricole de ses parents, et sa compagne Élise, totalement investie, veille cependant à définir le plus exactement son rôle. Ce documentaire français saisit, notamment par la musique, la vitalité et l’évolution d’un monde souvent réduit à ses difficultés socio-économiques.

Jules Follet

Jules Follet est né dans le Loiret, où il passe la majorité de son enfance. Il étudie deux années en classe préparatoire littéraire à Paris, avant d'entrer à l'IAD en 2013, école de cinéma belge, mais la quitte au bout d'une année seulement. Il démarre alors sa collaboration avec la société de production Rue de la sardine. En 2015, il réalise un court métrage documentaire Tu pouss t mort. Les années suivantes, il signe deux fictions courtes, Les alchimistes (2016) et Waterfountain, sélectionné au Festival de Clermont-Ferrand en 2018. Il réalise par ailleurs des clips pour Camille Bertault et Mama Stone and the Swang Gang.

En 2019, Jules Follet signe deux nouveaux courts métrages, toujours avec la société de production Rue de la sardine : Mal caduc, sélectionné au Festival Tous Courts d'Aix-en-Provence, et Comment faire pour, une comédie loufoque récompensée du Prix de la jeunesse au Festival Côté court de Pantin en 2019. 

En 2020, il retrouve les mêmes interprètes principaux, Hugues Perrot et Camille Rutherford, pour la suite de Comment faire pour : Comment faire pour deux.

Il se tourne alors vers le documentaire, à travers le court métrage Les météos d'Antoine, sélectionné en 2024 à la Quinzaine des cinéastes, à Cannes.

Critique

Deux jeunes hommes, Antoine et Léandre, s’affairent dans une exploitation agricole. Les seuls sons que l’on distingue sont ceux de la ferme : la rumeur des animaux, les engins mécaniques et une nature prégnante. Puis un écran de téléphone fait irruption en gros plan dans le cadre. La météo n’annonce pas de pluie dans les prochains jours. Ce qui pourrait être un détail trivial pour le commun des mortels est un enjeu majeur pour un exploitant agraire.

Jules Follet passe par le documentaire pour brosser le portrait, par le biais de petites touches modestes, de trois agriculteurs reprenant une ferme familiale. Niché à Coiron en Ardèche, le cinéaste montre une jeunesse combative, prise dans l’expectative du monde, coincée dans quelques impondérables du quotidien de paysan, notamment des interstices météorologiques. On filme les nuages comme une menace sourde et distante, tandis que la séquence suivante embarque dans une fête de village pleine d’entrain. Même face à l’adversité, la vie prend le dessus.

Au cinéma, la représentation des métiers ruraux se retrouvent souvent noyée sous les contraintes et les galères (voir Petit paysan d’Hubert Charuel, 2017, ou Au nom de la terre d’Édouard Bergeon, 2019). Le film troque la vieillesse un peu taciturne du Cousin Jules de Dominique Benicheti (1973), drastique étude des journées campagnardes, contre un mouvement plus vitaliste mais à l’horizon similaire : donner de l’intensité aux gestes simples. Néanmoins, Follet n’élude pas la réalité économique, via une séquence de comptabilité enrobée dans une volonté d’entraide. Le récit change encore un peu de tonalité avec l’apparition d’Élise, la petite amie d’Antoine, qui a le désir ardent d’apprendre les ficelles d’un monde instinctivement masculin. Sa présence octroie une certaine malice et un discours plus moderniste.

La caméra s’actionne ici comme le thermomètre des humeurs. Puisque les météos, c’est aussi le changement des états d’âme, subrepticement, avec les doutes qui peuvent s’emparer de chacun. Follet traite alors les craintes – légitimes – avec tendresse. La mise en scène, soucieuse, oscille avec des panoramiques embrassant chaque corps, les invitant tour à tour dans l’image pour montrer l’importance de chacun. Personne n’est laissé pour compte dans cet écosystème harassant, avec la terre comme objet de transmission.

William Le Personnic

Réalisation et scénario : Jules Follet. Image : Erwan Dean. Montage : Alexis Noël. Son : Arnold Zeilig. Musique originale : Simon Averous. Production : Superstructure.

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