Extrait

Les artifices

Kahina Le Querrec

2024 - 23 minutes

France - Fiction

Production : Améthyste Films

synopsis

Les grandes vacances, l’été, les campings et la mer. Comme chaque année, Jean, artificier, emmène en camping-car ses deux filles Julie, 8 ans, et Manon, 14 ans, au gré de ses spectacles pyrotechniques. D’habitude, elles ne bronchent pas mais cet été tout est différent : Manon aimerait bien vivre sa première histoire d’amour.

Kahina Le Querrec

Après une licence d'Arts du spectacle à Paris 8, Kahina Le Querrec intègre les Ateliers du cinéma de Claude Lelouch. Elle y réalise L’heure bleue (2019), sélectionné au FIFIB à Bordeaux et qui réunit Lomane de Dietrich et Manon Valentin, et Contre la nuit, produit par le GREC en 2021 et présenté au Festival Curtas de Vila do Conde.

En 2022, Kahina Le Querrec réalise Les artifices, produit par Améthyste Films et sélectionné au Festival européen du film court de Brest et à Premiers plans, à Angers, avant d'intégrer l’atelier scénario de La Fémis. Depuis, elle développe son premier long métrage, La faille, co-écrit avec Maïté Sonnet, projet lauréat de l'aide à l'écriture du CNC, tout en coécrivant pour des réalisateurs tels que Cédric Kahn sur son film 15/18.

Elle a été en outre costumière sur plusieurs longs métrages, dont Fête de famille et La prière, de Cédric Kahn justement, La chambre des merveilles de Lisa Azuelos ou encore le court métrage Avant Tim d'Alexis Diop (2020).

Critique

Dans ce court métrage de Kahina Le Querrec, les artifices du titre sont à la fois ceux qui explosent dans le ciel de manière spectaculaire, et ceux que l’on déploie discrètement pour briller et séduire – à l’image de ces strass que Manon et Julie ont collé sur leur visage et qu’elles se retirent mutuellement et avec tendresse à la fin de la soirée, lorsqu’il n’est plus question de faire semblant.

Les titres des deux premiers courts métrages de la réalisatrice, Contre la nuit (2021) et L’heure bleue (2019), suggéraient déjà une prédilection pour les moments nocturnes et ce qui peut s’y jouer. Il y était aussi déjà question des lumières chatoyantes de la fête, qui suscitent ou reflètent parfois des sentiments sombres, teintés de mélancolie. C’est d’ailleurs ce que le personnage de Jean, interprété par Jean-Baptiste Durand, réalisateur du remarqué Chien de la casse (2023), laisse entendre à ses filles lorsqu’il leur explique le rituel cathartique partagé avec son propre père, lui-même artificier : “On se disait que quand les feux explosaient, toute la tristesse qu’on avait, elle s’envolait avec le feu, et elle partait en fumée.”

Par ailleurs, c’est aussi le récit d’un moment de transition que Les artifices a en commun avec les films précédemment cités. S’il s’agissait d’étapes plus clairement identifiées dans ceux-ci – la première virée entre copines à la fin de l’année scolaire dans L’heure bleue, inspiré par les propres expériences de la réalisatrice, et l’anniversaire des dix-huit ans dans Contre la nuit –, le moment est ici plus flottant. Tandis que Manon veut s’affranchir du lien qui l’unit à sa sœur et son père, elle y revient pour trouver une consolation, semblable à celle que l’on peut trouver enfant dans les bras d’un parent. Ce réconfort fait alors affluer des souvenirs, tout en identifiant ce temps de l’enfance comme désormais révolu. Car malgré la déception nocturne, Manon semble prête à s’élancer vers d’autres horizons, tel que le dernier plan du film nous le suggère – tandis que le père et la petite sœur sortent du cadre, l’adolescente s’éloigne seule en nageant vers la rive opposée du lac, et finit par s’immerger complètement dans l’eau, sans hésitation ni artifices.

Anne-Sophie Lepicard

Réalisation et scénario : Kahina Le Querrec. Image : Paloma Pineda. Montage : Charly Cancel. Son : Laurent Blahay, Noëmy Oraison et Sylvain Adas. Musique originale : Kevin Malfay. Interprétation : Lou-Ann Trabaud, Jean-Baptiste Durand, Joséphine Le Goff, Tony Romantini et Melvyn Borg. Production : Améthyste Films.

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