
2021 - 15 minutes
France - Animation
Production : Ikki Films
synopsis
Après vingt ans de vie commune, Carine, Fabrice et leur fils Simon ont un quotidien bien réglé. Carine est cantonnée aux tâches ménagères, Fabrice passe son temps à regarder la télévision. Chacun dans son espace, leurs regards ne se croisent plus.
biographie
Claire Sichez
Née à Paris en 1986, Claire Sichez est sortie diplômée de l'École supérieure des Arts décoratifs de Strasbourg en 2009, puis de La Poudrière en 2011. Elle a réalisé depuis plusieurs courts métrages, productions pour la télévision ou films institutionnels, dont elle a le plus souvent aussi écrit le scénario et conçu la création graphique.
Son court métrage Iâhmès et la grande dévoreuse, produit par Xbo Films et co-réalisé avec Marine Rivoal, a fait partie de la présélection au César 2017 du meilleur film d’animation, catégorie court métrage.
Par la suite, elle a signé en solo chez Ikki Films L’amour en plan, qui a été sélectionné en compétition au Festival d’Annecy en 2021. S'appuyant sur le graphisme de Fanny Blanc, il a aussi remporté plusieurs prix à l'échelle internationale.
Pour en savoir plus, on consultera le site personnel de Claire Sichez.
Critique
La vague #Metoo ayant frappé de plein fouet le monde cinéma et le monde culturel, des pas de géant ont été accomplis. Aujourd’hui, difficile, par exemple, de considérer la domination masculine comme un état naturel du monde. C’est le côté lumineux du progrès. On y croit. Et quelles que soient les critiques qu’on lui adresse, le septième art a fait un grand bond. En France, dans le cinéma, de nombreuses femmes, réalisatrices notamment, sont aux commandes. On ne pourrait pas en dire autant des entreprises du CAC 40…
L’un des revers de la médaille, pour le cinéma, c’est que #Metoo, un peu comme le film social dans les années 1970, a enfanté une idéologie : des films qui ne se déplient que sous l’égide du rapport au genre. Et à première vue, L’amour en plan de Claire Sichez se brise proue et poupe contre cet écueil. D’autant que, malheur, le court métrage, damnée forme courte, se voit souvent bien malheureusement réduit, perverti, détourné à dessein illustratifs, pédagogiques, associatifs. De nombreux films courts (mais aussi des longs…) semblent aujourd’hui comme destinés non pas au public d’une salle de cinéma, mais à une salle de classe pour démontrer à des élèves hypothétiques (pur réceptacle) telle ou telle thèse, voire avec un peu d’espoir de lancer un débat. Le message, en l’occurrence, aborde la double charge, et la double journée de travail de la femme, tandis que l’homme, lui, n’en a qu’une… Voilà donc l’amour qui capote et qui reste en plan. On peut douter du bien-fondé d’une telle thèse aujourd’hui. Le monde de ce temps du dîner face à la télévision avec Les chiffres et les lettres en arrière-plan est heureusement quelque peu derrière nous et le film, avec ce côté suranné, résonne peu avec les thématiques féministes contemporaines. On pourra néanmoins argumenter en sa faveur que le cinéma, avec une grande constance, s’appuie sur des stéréotypes et partant de là, propose (souvent) autre chose.
C’est d’ailleurs l’une des qualités de ce petit film d’animation : ne pas entièrement en rester au cliché éculé du conjugal balancier des tâches pour évoquer également, par le biais d’un fantastique onirique, une question plus large. Celle de la parentalité, cela avec des kilowattheures de tendresse et d’humour. Le drame de la répartition des fils électriques et du compteur indivisible alimente une comédie sous-jacente avec des personnages pantins, silhouettes aux traits simplifiés dans un décor de maison de poupée qui naviguent sous l’influence de l’illustration de mode, notamment sous influence de Fanny Blanc. La belle partition musicale de Pierre Oberkampf, champagne de bulles de notes oisives, ludiques et lumineuses, agit parfois en contrepoint ou, au contraire, renforce les traits d’un monde clos relevant presque du jeu vidéo des Sims, mais dans une version améliorée de Sims devenant peu à peu et de manière libre tous conscients, de plus en plus conscients, de leur environnement.
Donald James
Réalisation et scénario : Claire Sichez. Animation : Capucine Latrasse, Denis Chapon, Eliott Moreau et David Wojcik. Montage : Santi Minasi. Son : Mathieu Z'Graggen et Régis Diebold. Musique originale : Pierre Oberkampf. Voix : Denis Chapon, Capucine Latrasse et Eliott Moreau. Production : Ikki Films.