Extrait

L’acteur

Hugo David, Raphaël Quenard

2023 - 25 minutes

France - Documentaire

Production : Lipsum Productions, Insolence Productions

synopsis

Raphaël est acteur. Il joue pour la première fois le rôle principal d’un long métrage. Cependant, personne ne comprend pourquoi il a été choisi. D’ailleurs, personne ne le comprend vraiment.

Hugo David

Après des études de cinéma effectuées à Montpellier, Hugo David travaille un temps pour une série TV locale avant de se voir confier par Jean-Baptiste Durand, son ancien professeur, la réalisation du making-of de son long métrage Chien de la casse, tourné fin 2021.

Il rencontre ainsi Raphaël Quenard et un court métrage coréalisé avec lui en résulte : L'acteur (avec comme seconde partie de titre “ou la surprenante vertu de l'incompréhension”). Ce faux documentaire n'en sera pas moins nommé au César du court métrage de la catégorie en 2024, en plus de sélections au Champs-Élysées Film festival, à Saint-Jean de Luz et à Namur.

Le duo poursuit dans la même voie pour un court long métrage d'une durée d'une heure et neuf minutes, I Love Peru, distribué au cinéma à l'été 2025.

Raphaël Quenard

Né le 16 mai 1991 à Échirolles (Isère), Raphaël Quenard est l'un des jeunes comédiens les plus en vue du cinéma français depuis ses rôles dans Chien de la casse de Jean-Baptiste Durand – qui lui a valu le César de la meilleure révélation masculine en 2024 – et dans Yannick de Quentin Dupieux – pour lequel il a été nommé la même année au trophée du meilleur acteur.

Auparavant, on l'avait vu dans quelques courts métrages marquants, comme Les mauvais garçons d'Élie Girard (2021) et dans des séries, par exemple HP (2028-2019).

Il rencontre sur le tournage de Chien de la casse le réalisateur du making of du film, Hugo David, avec qui il tourne le faux documentaire L'acteur, nommé au César du meilleur court métrage documentaire en 2024. Le duo se reforme sur I Love Peru, distribué en salles à l'été 2025.

On a revu Raphaël Quenard dans de nombreux longs métrages, dont Les trois fantastiques de Michaël Dichter, Le deuxième acte de Quentin Dupieux, L'amour ouf de Gilles Lellouche, Leurs enfants après eux de Ludovic et Zoran Boukherma, L'attachement de Carine Tardieu, etc.

Critique

Dans sa critique d’I Love Peru d’Hugo David et Raphaël Quenard (2025), film “grand frère” du court métrage L’acteur, ou la surprenante vertu de l’incompréhension (2023) des mêmes réalisateurs, Marcos Uzal, rédacteur en chef des Cahiers du cinéma, s’interroge : “Quenard parviendra-t-il un jour à sortir de l’unique rôle qu’il s’est créé et qui commence déjà à nous lasser tant la fraîcheur des débuts s’est transformée en surenchère trop consciente d’elle-même ?” Cette question conclusive ouvre les portes d’une problématique qui occupe et traverse plus largement le septième art. En quoi, sur les chemins de la célébrité, le régime d’image qu’empruntent, en France ou ailleurs, certains acteurs est-il celui d’un personnage clone ?

Ces derniers ne joueraient en effet plus vraiment des rôles, mais répéteraient ici et là, ad nauseam parfois, des gestes, des mots, une manière d’être et de parler, comme s’il s’agissait d’une marque à défendre. Nul doute que, prenant exemple sur les modèles iconiques du cinéma français : Jean Gabin, Lino Ventura ou Louis De Funès, Quenard a construit de toutes pièces ce personnage clone, cette marionnette. Du court au long, si la fraîcheur a été perdue, ce n’est peut-être donc pas à cause de la répétition du même, mais plutôt à cause d’un changement de taille : l’ombre qui anime la marionnette est passée derrière le miroir ; grisé par le succès, par le fait de devenir un “phénomène médiatique” qui ne carbure que de vanités en vacuités, dopé par les affres du succès, l’ivraie des émissions et des pages people voraces d’inepties et d’instants à clic.

Alors qu’il réalise le making of de Chien de la casse de Jean-Baptiste Durand (2023), Hugo David détourne le projet en un faux documentaire autour d’un acteur encore inconnu, insupportable et que Durand regretterait d’avoir employé, qui serait accusé de pourrir le film et dont l’ego surdimensionné ne cesserait d’entrer en contradiction avec la réalité : l’acteur est un loser porte-malheur…

Le répliquant Quenard se révèle dans son essence avant son étiolement : des phrases pseudo philosophiques évasives, une palette de jeu pop (accentuation du phrasé, représentation grotesque du métier d’acteur) et une vanité excessive contrebalancée par une sorte d’état d’ébriété lumineux et noir à la fois. Nommé pour le César du meilleur court métrage documentaire en 2024, ce faux documentaire n’est pas sans rappeler le savoureux et grinçant I’m Still Here de Casey Affleck avec Joaquin Phoenix (2010). Soit un film de doux dingues, inégal certes (mais un premier film pour David et Quenard...), dans lequel les défauts comme les qualités se confondent, se rejoignent, s’annulent dans le grand flux ludique, dans le jeu de miroir du vrai-faux porté par le second degré et la duplicité des deux compères, mais également des autres complices sans qui le film ne serait rien – on pense à Jean-Baptiste Durand, notamment pour la délectable première séquence.

À la question de la manipulation des clones, à savoir si tout cela était écrit, la dernière séquence où l’on nage en pleine potacherie (sur une scène, Quenard interprète un rôle de samouraï-canard pour un metteur en scène japonais) répond positivement. Or cette saynète qui en fera peut-être rire certains pose problème dans sa représentation caricaturale et très connotée du metteur en scène nippon. La provocation rejoint alors le pathétique tout en révélant une ambition aveugle, celle de la provoc’ prête à tout, pour le succès ou pour quoi ? On ne sait et on se le demande encore…

Donald James

Réalisation et scénario : Hugo David et Raphaël Quenard. Montage : Marc Allal et Hugo David. Son : Paul Jousslein. Musique originale : Hugo Rossi et Théodore Vibert. Interprétation : Raphaël Quenard, Jean-Baptiste Durand, Anthony Bajon, Galatéa Bellugi, Kengo Saito, Léa Millet et Thibaut Bayard. Production : Lipsum Productions et Insolence Productions.

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