2022 - 33 minutes
France - Fiction
Production : Quartett Production
synopsis
Axelle vit le pire jour de sa vie : alors qu’elle se remet mal d’une rupture amoureuse, elle doit se rendre à l’enterrement de vie de jeune fille de sa sœur, dans une station thermale fantomatique en pleine montagne. Heureusement, parmi les invitées, il y a Marguerite. Au détour d’un regard, l’amour revient.
biographie
Maïté Sonnet
Après des études de cinéma en classe préparatoire Ciné sup’ à Nantes, Maïté Sonnet intègre le Conservatoire européen d’écriture audiovisuelle. Elle y fait la rencontre de Giulia Volli, avec qui elle co-écrit Ne vois-tu rien venir ? (2019) et d'Arnaud Khayadjanian, qui lui confie le scénario de No More Heroes (2017).
Elle se distingue en 2018 avec son premier court métrage, Massacre, l’histoire d’une révolte adolescente sur fond de lutte des classes. Le film bénéficie d’une belle présence en festivals : au FIFIB, au Festival Premiers plans d’Angers (Prix du public) ou encore à Clermont-Ferrand (Prix de la meilleure musique originale). Massacre est produit par Quartett Production, qui accompagne également la jeune réalisatrice sur son prochain court, Des jeunes filles enterrent leur vie, dont la finition est prévue pour 2021. Par ailleurs, Maïté Sonnet travaille sur le scénario de nombreux projets d’animation notamment sur plusieurs épisodes de La cabane à histoires (diffusée sur Canal + Family).
Toujours avec Quartett Production, elle développe actuellement un projet de premier long métrage, Tu feras tomber les rois, ou l’histoire d’une jeune fille qui, après un bouleversement, est amenée à enquêter sur la mort de son frère.
Critique
Dans sa chambre d’enfant, Axelle bouquine dans son lit, à côté d’une belle maison de poupées. Une Barbie mariée y est vautrée avec ses demoiselles d’honneur dans une débauche de cupcakes géants tandis que Ken, sous un voile, pendouille entre les deux étages de l’édifice miniature. La jeune fille doit enfiler sa belle robe : avec trois amies, elles investissent le temps d’un week-end une gigantesque bâtisse transformée en centre de thalasso, pour enterrer la vie de jeune fille de sa sœur Pauline. Maïté Sonnet prend au mot la formule consacrée. La route de montagne qui les conduit à leur retraite semble mener tout droit à l’Overlook Hotel de Shining et les chœurs de femmes composés par Pierre Desprats ne contredisent pas la littéralité morbide qui préside à ces funérailles, fussent-elles symboliques. Le visage recouvert par un masque de beauté gris métal les cinq jeunes femmes flottent paisiblement dans un bain chaud, telles des Ophélie noyées.
Après les codes du film d’horreur dans Massacre (2019, cf. Bref n° 126), Maïté Sonnet reprend les motifs de la comédie romantique pour interroger ce que le romantisme au cinéma a fait de mortifère à l’amour. Le casting disparate rassemble des actrices venues d’horizons différents (Marguerite est jouée par la musicienne Aloïse Sauvage, Salomé Partouche est stand-upeuse et on a vu Camille Léon-Fucien dans Les Olympiades de Jacques Audiard). Le groupe forme un microcosme dont chaque membre évoque l’une des nuances du couple : Salomé se sent délaissée par son mari, Clara est chatouillée par des envies d’infidélité, Marguerite enchaîne les conquêtes féminines sans s’attacher, Axelle pleure une histoire terminée depuis plusieurs mois. Alors qu’elles quittent les bains, le club des cinq croise un groupe de septuagénaires qui se lisent l’historique de ces sources chaudes découvertes au XVIIIe siècle, comme elles l’avaient fait auparavant. Avant elles, des générations de femmes ont ici laissé barboter leurs illusions déçues sur la conjugalité. Le rêve du prince charmant ne saurait se réaliser par le simple fait d’enfiler une robe de princesse.
En pleine nuit, une alerte incendie tire de leur lit les pensionnaires de l’hôtel. La caméra de Marine Atlan saisit l’incongruité des filles en nuisette évoluant dans un bois verdoyant où Pauline, apeurée par l’engagement qui l’attend, s’est enfuie. Le torrent qui ferme le film laisse espérer que la vie ne s’est pas laissée pétrifier par les rêves de conformisme tandis que de joyeux chœurs de jeunes filles entonnent avec légèreté Ce n’est rien de Julien Clerc, une ritournelle qui célèbre la renaissance.
Raphaëlle Pireyre
Article paru dans Bref n°128, 2023.
Réalisation et scénario : Maïté Sonnet. Image : Marine Atlan. Montage : Marylou Vergez. Son : Clément Tijou, Clément Maléo et Xavier Thieulin. Musique originale : Pierre Desprats. Interprétation : Luna Carpiaux, Aloïse Sauvage, Natacha Krief, Salomé Partouche, Camille Léon-Fucien et Farida Ouchani. Production : Quartett Production.