2002 - 8 minutes
France - Fiction
Production : Gulliver Productions
synopsis
Le soir de Noël, un sapin se révolte contre l’occupant de la maison...
biographie
Michel Leray
Michel Leray est passé par l'illustre émission TV de Canal+ Les guignols de l'info, dont il a réalisé une soixantaine de sketches, tout en œuvrant également sur le volet du court métrage.
Il a ainsi signé plusieurs comédies dans les années 2010, dirigeant à plusieurs reprises Kad Merad : Pâques Man (2001), La toile (2001), Bloody Christmas (2002), Propriété commune (2004) et Bloody Christmas 2, parfois désigné comme La révolte des sapins (2010) et interprété par Frédérique Bel.
Critique
Entre 1990 et 2000, Gulliver Productions fait défiler la pellicule à travers près de soixante-dix courts métrages produits sur la décennie. À la tête de cette petite entreprise – qui ne connaît pas la crise à cette époque –, Yann Piquer, producteur et réalisateur décomplexé qui réalisa lui-même une bonne trentaine de films, souvent en duo avec son complice Jean-Marie Maddeddu. L’univers de Gulliver ? Des films très courts – lilliputiens, pourrait-on dire – et de l’humour – qui oscille entre potache et graveleux – ou du genre – fantastique, pastiché et décalé à souhait. De cette avalanche de films en forme de sketches souvent inventifs, quelques-uns s’extirpent et deviennent des phénomènes de festivals : Le homard (1995), du regretté Artus de Penguern (un plan-séquence en vision subjective de l’animal en route pour la casserole, avec Isabelle Candelier), Corridor d’Alain Robak (1989, avec Jean-François Gallotte, autre trublion du court métrage de ces années-là) ou Deux verveines et l’addition, de Gilles Pujol (avec Bernadette Lafont, 1995).
Bloody Christmas fait partie de ce peloton de tête et écume lui aussi les festivals, recevant même le Grand prix du Festival international du film fantastique de Gérardmer en 2003. Comme ses compères de l’écurie Gulliver, sa production artisanale et indépendante peu coûteuse – assez étrangement soutenue par Arte –, des dialogues et un scénario minimalistes favorisent son succès public. Imaginez : le soir de Noël, un homme pressé coupe un sapin dans un jardin et le ramène chez lui. Là, et las, le sapin se voit décoré par ce bûcheron d’un soir. Mais une photographie d’un paysage montagneux réveille la conscience du mélèze sauvage et libre qu’il fut. Pour recouvrer sa liberté, il passe à l’attaque et bombarde l’ennemi de ses (coups de) boules, ses guirlandes mutent en serpents lianes menaçants. L’homme acculé et affaibli riposte à la tronçonneuse dans un plan très “evil-deadien”, renforcé d’un hurlement rageux, véritable climax sonore et humoristique du film : le fameux « Saaaaaapiiiiiiiiiiiiinnn !!! » qui annonce le massacre à venir. Toutes les ficelles du thriller et du gore sont tirées via une mise en scène ultra référencée, sinon pompée, mais enjouée, qui use des zooms arrière, gros plans, plongées, contre-plongées, le tout bien appuyé par la musique anxiogène caractéristique du genre.
Bloody Christmas fête ses vingt-deux ans et, comme son interprète principal Kad Merad (crédité “Kad”, car encore en duo avec Olivier – Baroux –, lui-même présentau générique pour le making of du film), a pris quelques rides et perdu quelques aiguilles. Mais ce revenge movie épineux, écolo avant l’heure et qui ne se prend jamais au sérieux, nous replonge, avec une certaine et inavouable délectation, dans cette forme courte issue des années 1980, où la sacro-sainte chute et cette culture (pub) de l’efficacité narrative souvent trop simpliste, fut ensuite tant décriée (car répétitive, omniprésente, donc lassante). Mais le combo “sapin + Noël” fonctionne si bien que Gulliver Productions devait en exploiter le filon avec Bloody Christmas 2 en 2010, puis le long métrage Ça sent le sapin dans la pure tradition du film à sketches, en 2014. Il semblerait qu’une version longue de Bloody Christmas soit en développement : les conifères en colère sont de retour, sortez les tronçonneuses…
Fabrice Marquat
Réalisation : Michel Leray. Scénario : Michel Leray et David Neiss. Image : Julio Ribeyro. Montage : Claude-France Husson. Son : Christophe Leroy. Musique originale : Erwann Kermorvant. Interprétation : Kad Merad et Axelle Charvoz. Production : Gulliver Productions.