Extrait
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Après le rouge

Marie Sizorn

2022 - 14 minutes

France - Documentaire

Production : G.R.E.C

synopsis

En Corse, les habitants d’un village ont été les témoins d’un incendie gigantesque. Un souvenir amène la réalisatrice à cet événement qui a bouleversé le cours de leur vie et laissé des traces.

Marie Sizorn

Née en 1995, Marie Sizorn a intégré, après avoir terminé des études de graphisme à l'école Estienne, la Gerrit Rietveld Academie d'Amsterdam pour se consacrer à la vidéo. Elle en est sortie diplômée en 2019.

En 2022, elle a réalisé son premier court métrage documentaire, produit par le Grec : Après le rouge. Le film a été présenté au Champs-Élysées Film Festival, à Nice, à Poitiers, à San Sebastian et au Fipadoc à Biarritz.

Marie Sizorn travaille également comme assistante de production au sein de la société Paris-Brest Productions.

 

Critique

Ce court métrage documentaire de Marie Sizorn s’ouvre sur une photographie floue où l’on devine peu à peu des taches rouges derrière la crête noire des montagnes, guidé par la voix-off de la réalisatrice. Celle-ci évoque le souvenir d’un incendie qui s’est produit dans son enfance, une image si forte qu’elle aurait “effacé tout le reste”. Cette mémoire saturée de rouge est le point de rencontre avec les personnes à qui elle donne la parole, et avec qui elle choisit d’apparaître – les habitants du village corse de Chiatra, qui ont fait l’expérience terrible du feu ravageant leurs maisons et la montagne autour d’eux en janvier 2018.

Ils racontent ce qu’ils ont vécu à partir de photographies prises après le désastre, tentent de le partager dans des lieux où la végétation a désormais repoussé. Marie Sizorn s’attarde sur les traces encore visibles, notamment des troncs d’arbres calcinés qui semblent faire écho aux fêlures invisibles et intérieures, à l’indicible de l’expérience, en même temps qu’ils dégagent une étrange beauté. Sans doute exacerbée par un parcours dans l’art vidéo, la sensibilité de la réalisatrice à cette évocation double de la matière est évidente : “Pour moi, c’était quelque chose de très esthétique, que je n’avais jamais vu. Je voyais des sculptures ; les villageois, eux, voyaient des spectres, des corps carbonisés…” (1).

Cette tension entre le visible et l’invisible est présente tout au long du film. Le rouge du titre est presque absent dans les plans où la parole est mise en scène – plans de silhouettes en contre-jour, de paysages montagneux dans la brume et verts de la végétation revenue. Mais il est si présent dans les récits que la braise d’une cigarette allumée par l’un des personnages suscite un terrible écho.

Écho également dans la dernière séquence, avec le retour de la première image du film, cette fois nette – le feu nous est enfin donné à voir, à travers une succession de photographies qui mêlent encore une fois l’horreur et la beauté, des couleurs profondes, comme chargées des paroles qui ont précédé dans le film, ou comment vivre après le rouge

Anne-Sophie Lepicard

1. Entretien avec la réalisatrice pour le blog de Mediapart.

Réalisation : Marie Sizorn. Image : François Ray. Montage : Tomas Calí. Son : Bastien Cornet, Ismaël Camara-Silvestre et Jules Jasko. Production : G.R.E.C.