
A Kind of Testament
Stephen Vuillemin
2023 - 16 minutes
France - Animation
Production : Remembers
synopsis
Une jeune femme tombe sur des animations sur Internet qui ont manifestement été créées à partir de ses selfies privés. Une inconnue portant le même nom avoue une usurpation d’identité. Mais la mort est plus rapide que la réponse à la question : pourquoi ?
biographie
Stephen Vuillemin
Originaire de Besançon, où il est né en 1986, Stephen Vuillemin est sorti diplômé des Gobelins en 2008. Animateur 2D et 3D, il est aussi illustrateur pour des magazines tels que le New York Times ou British GQ et élaborateur de character design pour des pubs et des jeux vidéos.
En 2023, il achève son premier court métrage d'animation, A Kind of Testament, multi-primé dans le monde entier, diffusé sur Canal+ et retenu en pré-sélection pour les Césars et les Oscars 2024. Le film est aussi récompensé du Prix émile-reynaud, décerné par les adhérents de l'Afca, en 2023.
Il signe en parallèle un premier album jeunesse, Le bonhomme, paru en 2024 chez Albin-Michel Jeunesse.
On trouvera plus d'informations sur son site personnel.
Critique
Des fleurs pimpantes se retrouvent rapidement fanées et suintantes. La traversée du miroir se fait avec une certaine idée d’un macabre sous-jacent, comme dans la célèbre introduction de Blue Velvet de David Lynch (1986), où les fleurs dans les jardins impeccables peuvent cacher bien des choses. A Kind of Testament pose ainsi une question assez similaire aux interrogations lynchiennes : qu’est-ce qui se dissimule derrière nos vies bien rangées ?
Dans une potentielle et dérangeante usurpation d’identité, une jeune femme fait l’expérience malaisante de voir son image détournée. Ce qui commence comme une sorte de chronique digitale se mue peu à peu en quête de soi morbide. Le film s’engouffre alors dans des directions et des intrications étonnantes. Stephen Vuillemin, qui entreprend seul la conception de ce projet d’animation, avant d’être épaulé par la société de production Remembers, fait preuve d’une réelle ambition formelle. Tout d’abord intime (découvrir des animations de soi sur le Net), le récit de A Kind of Testament gagne en ampleur devenant une variation sur la mort, accompagnée de visions hallucinées évoquant les grands peintres.
Dans une animation en 2D inspirée par les traits saillants de Satoshi Kon et son Perfect Blue (1997), le trouble inhérent aux différentes strates possibles du réel s’installe à l’aide de la mise en abyme, pour ne plus nous lâcher. Vuillemin pioche pêle-mêle dans la représentation des vanités du XVIIe siècle, dans la sculpture avec la citrouille de l’artiste japonaise Yayoi Kusama, jouant entre l’étrange et le poétique ou encore avec un goût certain pour l’extravagance chromatique des vêtements de grands couturiers.
C’est ce mélange des arts qui, à la fois, déconcerte et sied à une narration instable. Une longue séquence épouvantée dans des toilettes aux carreaux blancs – qui n’est pas sans rappeler les séquences de transformation dans The Substance de Coralie Fargeat (2024), notamment avec le surgissement décrépi d’une réification de soi-même – démontre la volonté d’en faire une œuvre mutante et allègrement inclassable.
William Le Personnic
Réalisation et scénario : Stephen Vuillemin. Son : Lucien Krampf et Matthieu Gasnier. Animation : Jocelyn Charles, Tom Rameaux, Gabrielle Selnet et Stephen Vuillemin. Musique originale : Qoso. Voix : Naomi Yang, Angela Clerkin, Freida Siddall, Aisha Arden et Bethy Read. Production : Remembers.