En salles 08/06/2018

Les sucreries amères de “The Cakemaker”

Cette semaine, il n’y a pas que les dinosaures de “Jurassic World” à retrouver dans les salles. Notre bon conseil en vue du week-end est un premier long métrage, “The Cakemaker” d’Ofir Raul Graizer.

Avant The Cakemaker, Ofir Raul Graizer a signé auparavant plusieurs courts métrages, parmi lesquels Dor, qui avait été présenté en compétition internationale au Festival de Clermont-Ferrand en 2009 et suivait un soldat de retour chez lui après avoir tué un jeune Palestinien, pour une soudaine remise en question des valeurs traditionnelles de son milieu. Le réalisateur avait ensuite été de l’aventure de Chili Factory, en 2015, cosignant avec Teresita Ugarte La discothèque.

Avec The Cakemaker, distingué du Prix œcuménique à Karlovy-Vary l’an dernier, il installe son récit entre Allemagne et Israël, dans les pas d’un timide pâtissier berlinois commençant une tendre liaison avec un homme d’affaires israélien en déplacements réguliers dans la capitale allemande et, ayant appris son décès accidentel, se rendant à Jérusalem et parvenant à se faire embaucher comme cuisinier au café tenu par Anat, la femme de son amant disparu…

Derrière ce triangle amoureux insolite se profile des enjeux intimes particulièrement forts, la jeune veuve se sentant peu à peu attirée par son employé, et la question de savoir quand le pot aux roses sera découvert ne phagocyte jamais les émotions des personnages, aisément sensibles au spectateur – dont un autre sens est mis à l'épreuve à la vision des gâteaux inouis concotés par Tomas ! Bien sûr, le fait que ce dernier soit allemand et qu'il s’installe en Israël, alors que l’épouse de celui dont il était tombé amoureux, Oren, évolue dans un milieu empreint d’orthodoxie religieuse, pose une complexité supplémentaire aux rapports, même si les Juifs pratiquants qui gravitent autour d’Anat et son petit garçon sont parfois à la limite de la caricature – voir l’oncle Moti et sa rigidité envers les règles casher. Mais c’est aussi une histoire d’affranchissement d’un carcan étouffant et injuste qui se voit développée autour de la figure d’Anat, incarnée par Sarah Adler, vue récemment dans Foxtrot, de Samuel Maoz, et qui s'affirme encore comme une très grande actrice du cinéma mondial actuel.

Christophe Chauville