Retour sur Court métrange 2018
Alors que trois films hautement représentatifs des années passées du festival sont toujours en ligne sur Brefcinema, que nous a réservé le millésime 2018 de l’événement rennais ?
La 15e édition de Court métrange, le Festival international du court métrage insolite & fantastique de Rennes aura constitué une charnière dans l’histoire de la manifestation, puisque sa directrice depuis 2004, Hélène Pravong, a officialisé lors de la soirée de clôture son départ de la manifestation qu’elle avait fondé (avec Steven Pravong). Cyrielle Dozières, vice-présidente de l’association organisatrice, prendra sa suite et c’est tout naturellement que nous leur souhaitons le meilleur à toutes les deux.
Au sommet du palmarès de cette édition des quinze ans, on trouve un film américain, The Robbery de Jim Cummings (photo de bandeau), à qui le Grand prix Court métrange a été unanimement remis par un jury présidé par le cinéaste belge Fabrice du Welz (qui vient d’achever un nouveau long métrage, Adoration). Ce film de moins de dix minutes qui retrace un braquage de supérette par une jeune femme qui n'a pas froid aux yeux, qui ne tourne pas comme prévu, est effectivement tranchant et en équilibre inattendu entre suspense, comédie et drame social. Il est aussi porté par une excellente comédienne, Rae Gray.
Le toujours prisé Méliès d’argent a été décerné à Hybrids, cette production du Mopa d’Arles signée de cinq étudiants et déjà remarquée dans plusieurs festivals, notamment le Poitiers Film Festival 2017, où le Prix du public et le prix des lycéens de la compétition “So French !” lui étaient advenus. On n’insistera pas sur le degré de perfection visuelle de ces étranges animaux de synthèse qui peuplent ces six minutes et des poussières... Ils sont en route, cette fois, pour un éventuel Méliès d’or.
Outre la mention spéciale attribuée au grinçant Traces du Grec Thanassis Vassiliou, qui imagine un mouvement fascisant arrivé au pouvoir dans son pays (sans nommer Aube dorée), on abondera au choix de France Télévisions, en la personne de Christophe Taudière, grand habitué des lieux, de récompenser l’Irlandais Wave de Benjamin Cleary (photo ci-dessus), une curiosité drôle et caustique sur l’autisme généralisé de la planète à l’ère 2.0. On verra donc le film dans le cadre d'Histoires courtes, sur France 2, dans les mois qui viennent.
Hors palmarès, les trois jours de compétition auront permis de revoir quelques réussites de l’année – Reruns, le meilleur Rosto depuis pas mal de temps, ou l’inusable La Mort, père & fils – et de faire quelques découvertes intéressants, comme le “poème philosophique” mexicain (Some) Mortal Tales de René Rodriguez Botello ou l’amusant Clanker Man de Ben Steiner, qui recycle les possibilités inépuisables de l’humour british. Qu’on se rassure, il y avait toujours de l’hémoglobine et des créatures peu ragoûtantes, que ce soit dans l'états-unien et sataniste Stay, dans l'australien et horrifique Daemon Runner ou dans Le jour où maman est devenue un monstre, avec lequel la jeune Joséphine Hopkins, issue de l’ESRA Paris, affirme, après Margaux l’an dernier, sa volonté de persévérer dans le genre. Il y aura décidément toujours des “courts métranges” et le festival idoine pour les montrer...
Christophe Chauville