En salles 03/07/2018

Jeunes, amoureux, fiévreux : “Joueurs”

Le mois de juillet débute, côté français, avec la sortie cette semaine de “Joueurs”, le premier long métrage de Marie Monge.

Joueurs faisait partie de l’imposant contingent français de la dernière Quinzaine des réalisateurs, mais c’était, au sein de cette délégation, le seul premier long métrage. On se souvient que sa jeune réalisatrice de 31 ans, Marie Monge, s’était distinguée auparavant avec Marseille la nuit, l’un des cinq nommés au César du meilleur court métrage en 2014, ce qui avait d’ailleurs pu constituer une surprise relative à l’époque. Non pas que ce moyen métrage également montré à Premiers plans à Angers et à Entrevues à Belfort ne fut pas “au niveau” ; il témoignait même d’une certaine habileté à enraciner des trajectoires individuelles et des relations intimes, amicales ou sentimentales, dans un terreau de film de genre, celui d’un thriller social confrontant ses jeunes protagonistes à un avenir obstrué. Ceux-ci vivotaient de petits trafics de drogue dans une morne petite ville de province – Limoges, en réalité, car la Marseille du titre ne constituait qu’un rêve, un fantasmatique objectif de nouveau départ et d’autre existence possible. Ce que le poids d’un fatum de tragédie moderne condamnait immanquablement, le déchaînement de la violence étant au bout du chemin, en plus de l’échec d’un amour entrevu.

La parenté qu’entretient Joueurs avec cette atmosphère volontiers poisseuse resurgit sporadiquement, le milieu exploré étant cette fois celui des salles de jeu clandestines de Paris, où un accro au poker et à la roulette, Abel, entraîne une jeune femme dont il est tombé amoureux et qui, bien qu’ayant a priori la tête sur les épaules, contracte à son tour le dévorant virus. À la menace sourde des trafiquants de drogue de Marseille la nuit répond dans le long métrage celle des recouvreurs de dettes, encore plus cruels et vicieux. La silhouette ronde et trapue de Karim Leklou, véritable révélation du premier, jette un pont évident entre les films, même si c’est le duo Tahar Rahim/Stacy Martin qui y tient le haut du pavé. Et la passion amoureuse qui les emporte est à son tour marquée du sceau de la fatalité, comme il se doit pour tous les “amants de la nuit” de la longue tradition du film noir.

Christophe Chauville


Filmographie courts métrages de Marie Monge

Les ombres bossues
(2007, 30 min)
Mia (2009, 23 min)
Marseille la nuit (2012, 42 min)

Marseille la nuit est disponible en ligne sur Brefcinema depuis le 11 juillet.

Photos : © The Film.