En salles 07/12/2016

Alice, ou le Girl Power avant l’heure !

Les burlesques proposés en salles en copies restaurées par Malavida cette semaine sont d’étonnants courts métrages des années 1920 mêlant, sur les traces d’une jeune héroïne prénommée Alice, animation et prises de vues réelles. Le jeune Walt Disney en était aux commandes, un peu avant qu’il ne crée le personnage de Mickey Mouse.

Le premier épisode des Alice Comedies date de 1924 et emmène son héroïne au bord de la mer : Une journée à la mer annonce la couleur, celle d’un humour iconoclaste teintant toutes ces aventures, le chien de la gamine la conduisant lui-même en petite voiture vers sa destination, où un marin entreprend de narrer des souvenirs de naufrage susceptibles de provoquer quelques cauchemars…

La fillette se retrouve ainsi, entre autres, aux prises avec une gigantesque pieuvre pas commode du tout et l’hybridation des techniques est à la fois pleine de charmes et assez sophistiquée.

On retrouve la même qualité graphique dans Le pestacle de Far-west, qui ouvre le programme, et qui, tourné également en 1924, fait la part belle au personnage d’Alice, chef d’une petite bande de kids donnant une petite représentation de théâtre et s’opposant à des importuns s’étant invités sur les gradins et huant les acteurs amateurs. Alice se montre alors la plus courageuse et combative, renvoyant son rival, une sorte de mini-Fatty grassouillet, vers sa mère, pleurnichant et forcément piteux.

Tel est l’atout principal de cette série, incontestablement, que cette petite Virginia Davis, née le 31 décembre 1918 à Kansas City et qui avait donc à peine six ans à l’époque ! Avec ses grands yeux à la Lilian Gish, elle est simplement irrésistible et les sages anglaises de ses longs cheveux blonds se défont volontiers quand elle fait le coup de poing ! On l’apprécie aussi dans La maison hantée, toujours de 1924, qui voit apparaître Julius le chat en partenaire idéal de la fillette. Les interactions sont encore visuellement très abouties, comme dans Alice chef des pompiers, deux ans plus tard, mais où – hélas – Margie Gray a remplacé Virginia, dont les parents n’avaient pas trouvé d’accord avec Disney qui partait travailler à Los Angeles après la faillite du studio Laugh-O-Gram de Kansas City.

Très vite, en 1927, le dessinateur à la fine moustache crée Oswald le lapin, puis l’année suivante, dans Steamboat Willie, une souris qui devient vite le héros de dessin animé le plus célèbre au monde. Alice, elle, sombrera dès lors quelque peu dans l’oubli, son interprète emblématique s’éteignant en 2009 à l’âge de quatre-vingt ans, mais un travail de restauration et de numérisation effectué par la Cinémathèque néerlandaise remet quelques-unes de ses cinquante-six aventures en lumière, pour le bonheur de tous, sans critère réducteur d’âge ou de sexe, même si les petites filles jubileront particulièrement devant cette héroïne qui en impose sacrément…

Christophe Chauville