Bis repetita : week-end à Naples et premier long pour Émilie Noblet
Dix ans après la révélation d’Émilie Noblet au Festival de Clermont-Ferrand, grâce à Trucs de gosse, le premier long métrage de l’ancienne pensionnaire de la Fémis, Bis repetita, sort sur les écrans ce mercredi 20 mars. En lorgnant tout à la fois, avec drôlerie et intelligence, vers la “romcom” et le teenage movie.
Dans Bis repetita, Émilie Noblet met en scène une prof de latin désabusée, et un peu à la ramasse. Delphine n’a plus guère d’illusions sur son sacerdoce dans son établissement de banlieue et a acheté la paix sociale de la classe contre des bonnes notes tout à fait fictives. Mais du coup, ce niveau d’excellence global conduit ces élèves “modèles” à une sélection en finale d’un championnat d’Europe de latin devant se tenir à Naples !
On pourrait vite penser que le film, récompensé lors du dernier Festival de L’Alpe-d’Huez, se place dans la tradition de la comédie estudiantine franchouillarde, mais on n’est bien loin de nouveaux Sous-doués, par exemple, tant la finesse d’écriture et l’humour spécifique d’Émilie Noblet conduit ailleurs. Vers les meilleures réussites de ce sous-genre du cinéma américain, par exemple, mêlant codes de la comédie romantique et esprit mal élevé, sinon “bad ass” ou même trash. Delphine, impeccablement incarnée par Louise Bourgoin – qui s’en amuse beaucoup, de toute évidence – évoque ainsi plutôt la Cameron Diaz de Bad Teacher, disons, fumant, se saoulant, couchant facilement et se débinant volontiers, bien entendu, de sa noble vocation !
L’héroïne de TGV (actuellement visible sur Brefcinema), jouée par Laetitia Spigarelli, était plus rêveuse, quoique gaffeuse, aspirant à une possible romance sur les rails, où elle faisait ses premiers pas en tant que contrôleuse, et il est d’ailleurs amusant de voir combien le motif du voyage perdure dans les histoires d’Émilie Noblet – un train très vintage avait aussi son importance dans la rencontre se trouvant à la racine de son premier film, Là-bas la mer, produit par le Grec en 2012.
Trucs de gosse, qui avait révélé la réalisatrice à Clermont-Ferrand en 2014 (il avait alors reçu le Prix Canal+), s’imprégnait lui aussi de schémas classiques du teen-movie, se déroulant dans les couloirs et salles d’un multiplexe, dont deux jeunes employés se rapprochaient sensiblement, malgré les réticences initiales de la plus ancienne (en âge et comme employée dans le cinéma) des deux.
La réalisatrice y filmait déjà des individus au sein d’un groupe, comme dans Bis repetita, où Delphine évolue à l’intérieur du groupe d’élèves dont elle a la charge, avec un autre accompagnateur, qui n’est autre que le neveu de sa principale, le très sérieux Rodolphe. Celui-ci est joué par Xavier Lacaille, réalisateur du court métrage Un dernier été, produit par Films Grand Huit en 2022 et qui s’inscrivait également dans ce registre de la comédie ado façon ciné US.
Il faut cependant rappeler qu’Émilie Noblet s’est par ailleurs aventurée dans un tout autre territoire fictionnel, à travers À propos d’Anna, film d’école de la Fémis datant de la même année que Trucs de gosse, et où l’on suivait une jeune comédienne ayant fui sa province pour gagner Paris et subissant les reproches à peine voilés, lors de l’un de ses retours, alors qu’un drame intime se dévoilait peu à peu, au fil de la narration. Autrement dit un trauma lié à des violences sexuelles intra familiales, délicatement évoqué et qui prend une résonance toute particulière dix ans après.
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