Livres et revues 06/12/2016

Festival Jean-François Laguionie

Alors que son sixième long métrage, “Louise en hiver”, est sur les écrans, les Éditions de l’œil publient trois ensembles qui offrent l’occasion de parcourir ou de revisiter une des œuvres les plus prolifiques du cinéma d’animation français.

Alors que son sixième long métrage, Louise en hiver, est sur les écrans, les Éditions de l’œil publient trois ensembles qui offrent l'occasion de parcourir ou de revisiter une des œuvres les plus prolifiques du cinéma d’animation français.

Ce n'est pas faire injure aux pertinentes analyses proposées par Pascal Vimenet de dire que l’essentiel de l’ouvrage publié à l’occasion de l'exposition consacrée à Laguionie au Musée-Château d’Annecy au printemps dernier, tient aux longs entretiens qu’il a menés. Le parti pris chronologique fait de ces conversations suivies une sorte d’autobiographie d’un créateur finalement peu questionné. Laguionie raconte sa passion pour le dessin, pour la mer, les bateaux, les navigateurs, sa fascination pour le mime, sa rencontre avec Paul Grimault, le rôle du Service de la recherche de l’ORTF, les tentatives de films en prises de vue réelles.

Une deuxième partie, tout aussi passionnante, enchaîne film par film, depuis ses premiers courts métrages, propos qu'on peut mettre en relation avec les films eux-mêmes, l'intégralité de ses courts métrages étant éditée sous la forme d'un livre-DVD. On y retrouve La demoiselle et le violoncelliste (1964), en papier découpé, coup d'essai et coup de maître, Grand prix du Festival d'Annecy, L'acteur (1975), réflexion sur les apparences aux accents faustiens, ou bien encore cet autre classique, méditation sur l'existence, La traversée de l'Atlantique à la rame (1978), Palme d'or et César.

Un seul film manque à l'appel, en prise de vue réelle, Hélène ou le malentendu (1972), devenu introuvable et que Laguionie renie. Dans l'autre exception d'une œuvre entière dédiée à l'animation, Plage privée (1971), un conte fantastique où, un certain jour de la semaine, les usagers d'un bain douche parisien, via un mystérieux couloir, accèdent à une plage de l'Atlantique, on découvre, parmi les acteurs, Jean Vimenet, peintre, comédien occasionnel (il est le garde-champêtre dans Mouchette, de Robert Bresson), modèle du personnage de vagabond dessiné dans Une bombe par hasard (1969) et père de Pascal Vimenet. On comprend mieux pourquoi on sent Laguionie en confiance au fil de ces entretiens.

Un dernier choix de rencontres avec des personnes liées à La Fabrique, studio d’animation et société de production créé au début des années 1980, d’abord pour réaliser Gwen, le livre de sable (1984), premier long métrage de Laguionie, clôt l’ouvrage.

Évoquant Gwen, le réalisateur parle d’une rupture totale dans son travail. « Faire un long métrage, dit-il, c’était ne plus être seul, c’était partager le travail avec des gens que j’aimais beaucoup, dont j’estimais le travail, comme Bernard Palacios. Il y avait aussi l’ambition folle d’essayer de faire un long métrage aussi beau qu’un court métrage. Je ne sais pas pourquoi, mais un court métrage, c’est toujours plus beau qu’un long. Ça tient à la durée du travail, à la répartition des tâches, à la technique, peu importe, ou peut-être à la volonté de s’adresser à un grand public et d’avoir des images un peu plus lisibles. »

Louise en hiver est le cinquième long métrage de ce conteur. On poursuivra le plaisir de ce conte, où le quotidien se fait métaphysique et côtoie le fantastique, avec l'album du film. À glisser sous le sapin.

Jacques Kermabon

 

Jean-François Laguionie, collection Les animés (contient le DVD du documentaire Le rêveur éveillé, de Jean-Paul Mathelier), Éditions de l’œil, Musée-Château d’Annecy, JPL Films, 2016, 35 euros.

Jean-François Laguionie, La demoiselle, la traversée et autres courts, livre-DVD (contient tous les courts métrages de Laguionie et des bonus, dont le documentaire Le rêveur éveillé, de Jean-Paul Mathelier), La traverse, Éditions de l’œil, 2016, 18 euros.

Jean-François Laguionie, Louise en hiver, Éditions de l’œil, 2016, 25 euros.