DVD 23/06/2017

Chet à voir : "Born to Be Blue" en DVD

"Born to Be Blue" n’est pas un biopic de Chet Baker proprement dit, mais se concentre sur une période de sa chaotique vie, autour de 1970. Parmi les bonus de son édition DVD, on trouve le magnifique "Chet’s Romance" de Bertrand Fèvre.

Le 13 mai 1988, Chet Baker se tuait à Amsterdam dans les circonstances que l'on sait, restées énigmatiques, tandis que le festival de Cannes avait commencé depuis deux jours, comprenant au sein de sa sélection de courts métrages Chet's Romance, où le jeune Bertrand Fèvre avait filmé, à la fin du mois de novembre de l'année précédente, le génial jazzman en train de se produire en live, pour un bref essai situé entre le documentaire et la captation, saisissant la grâce de cette musique et de cette voix, en noir et blanc et entre deux volutes de fumée. 

Ce classique du court français contemporain, qui devait décrocher le César du court métrage documentaire en 1989, est opportunément proposé parmi les suppléments de Born to Be Blue, du réalisateur canadien anglophone Robert Budreau, qui s'intéresse ici au prodigieux trompettiste à la fin des années 1960, une époque délicate pour lui, entre contrôle judiciaire, tabassage en règle aboutissant à l'émiettement de sa mâchoire (donc plutôt problématique pour un prodige de la trompette) et projet de film quelque peu foireux autour de son itinéraire (avec sa propre interprétation). Évidemment, Baker est déjà alors bouffé par sa toxicomanie et peine à retrouver un second élan dans une carrière partie à vau-l'eau, malgré la rencontre d'une nouvelle femme de sa vie, en la personne de sa partenaire à l'écran, la douce Jane (jouée par Carmen Ejogo).

L'approche de cette production sélectionnée à Toronto et Deauville en 2016 est assez classique, dans la pure orthodoxie du biopic anglo-saxon, mais quelques facettes du portrait de l'artiste ne cessent de captiver, comme son rapport conflictuel avec son père, qui lui reproche de chanter avec une voix de femme (!), ou son complexe vis-à-vis de ses pairs afro-américains, le bienveillant Dizzy Gillespie ou l'acariâtre Miles Davis. Le caméléonesque Ethan Hawke livre comme on s'en doute, dans le rôle principal, une performance des plus respectables, allant même jusqu'à faire entendre son propre timbre sur certains morceaux – le musicien David Baird est à l'œuvre sur la majeure partie de la B.O. 

Robert Budreau s'était déjà intéressé à plusieurs reprises à la figure du musicien, notamment à travers un court métrage également présent dans les bonus : The Deaths of Chet Baker (2009), qui revient sur le dénouement tragique d'Amsterdam et cette chute inexpliquée depuis la fenêtre d'un hôtel de l'ex-“James Dean du jazz”, alors sous l'emprise totale et démesurée de l'héroïne et de la cocaïne. Ou quand les addictions aux stupéfiants dépassent finalement celle de la musique. Let's Get Lost...

Christophe Chauville

 

Born to Be Blue de Robert Budreau, DVD (simple ou édition Deluxe) ou Blu-ray, Condor Entertainment.
Disponible depuis le 22 juin 2017.