309 minutes de courts métrages de Jean-Gabriel Périot en DVD
L’édition majeure de cet automne en matière de films courts, c’est bien sûr l’intégrale des œuvres réalisées par Périot l’insoumis, disponible chez Potemkine.
On sait qu'un credo politique se trouve inlassablement à l'origine de l'inspiration du prolifique “JGP”, y compris dans ses longs métrages, Une jeunesse allemande en particulier. Pour les courts, c'est depuis la révélation du survitaminé We Are Winning, Don't Forget (2004), une évidence encore plus forte, dans ses fameux films construits sur la base d'archives et dans tous les autres, la forme du traitement étant toujours au moins aussi importante que le sujet retenu. Ce double DVD l'illustre sur la longueur, depuis les titres les plus célèbres, comme Eût-elle été criminelle ou 200 000 fantômes, à d'autres qui connurent plus discrète carrière.
Femmes tondues au lendemains de la Libération, victimes japonaises de la bombe atomique, Afro-américains méprisés (dans le fiévreux et impressionnant The Devil, photo ci-contre), etc. : le regard posé par le cinéaste interroge le nôtre, directement, tout en explorant la dimension de l'humanité commune... et oubliée, surtout, trop fréquemment. L'extraordinaire diptyque formé par Nos jours, absolument, doivent être illuminés et Le jour a remplacé la nuit (voir Bref n°108) s'y emploie avec force, abordant le documentaire sur un versant singulier et au final sacrément audacieux (en amenant, entre autres, des détenus en maison d'arrêt à jouer ou à chanter devant la caméra).
On oublie un peu trop les incursions, pourtant répétées, de Périot dans le domaine de la fiction, et cette rétrospective numérique remet donc les choses d'aplomb à travers, par exemple, L'optimisme, et son héroïne débordante d'amour pour ses contemporains et se heurtant à la violence sociale, comme une Candide moderne peu préparée aux conséquences pourtant prévisibles de ce qu'elle peut déclencher (un clochard qu'elle étreint s'indigne ainsi qu'elle refuse de baiser...). Périot est un pur, dans le fond, et son cinéma comme sa personnalité sont parfaitement résumées par ce titre magnifique, celui de l'un de ses courts les plus récents (datant de 2014, voir Bref n°114) : Si jamais nous devons disparaître, ce sera sans inquiétude, mais en combattant jusqu'a la fin (photo de bandeau). Ce qui résonne comme une possible puissante profession de foi (laïque, bien sûr !)...
Christophe Chauville
Courts métrages / Short Movies : Jean-Gabriel Périot, DVD double, Potemkine Films, 19,90 euros.
Disponible depuis le 4 septembre 2018.
