Web et TV 03/05/2021

Montées de sève avec Tops of the Shorts

La belle saison, celle des amours, déboule sur Canal+ Cinéma, ce dimanche 9 mai, à travers deux courts qui envisagent cependant le motif sur un versant pas forcément attendu.

Le titre générique du prochain numéro de Top of the Shorts, “L’amour, l’amour”, correspond au début de cette chanson de Mouloudji qu’a récemment convoquée Cédric Kahn (dans Fête de famille, 2019), avant un spot publicitaire largement diffusé sur le petit écran. Et pour poursuivre sur les dites paroles, l’amour c’est le poivre du temps, une rafale de vent, une feuillée de Lune… Des mots fleuris qui résonnent idéalement avec la rencontre initiale d’une “romcom” plutôt réussie, signée Tania Gotesman : Autotune (photo de bandeau).

Un quiproquo lance, comme il se doit, l’histoire sur les bons rails : Issa rend service à un pote en livrant pour lui un sachet de cannabis, tombe raide dingue de sa jeune “cliente”, Alma, et doit se dépatouiller avec son choix de ne pas révéler à la belle, lorsqu’il la revoit, qu’il n’est pas dealer, mais un garçon somme toute assez propre sur lui. On sait que le genre fonctionne avant tout sur le couple que le fil de la narration doit permettre de réunir et Autotune coche la case sans faillir, grâce au très cool Gradi Beinz et à la solaire Louise Grinberg, que l’on avait découverte avec Entre les murs de Laurent Cantet, puis parmi les 17 filles des sœurs Coulin, il y a déjà dix ans.

Le second film de ce numéro printanier de “TOTS” nous vient d’Inde et, caractéristique déjà insolite et toujours remarquable, consiste en un plan-séquence d’un quart d’heure (le film dure dix-sept minutes avec le générique) : Mizaru, de Sudarshan Suresh (photo ci-dessus), suit dans un jardin public deux jeunes gens dans la vingtaine cherchant, au jour de la Saint-Valentin, un peu d’intimité pour profiter à l’écart des regards de quelques caresses clandestines dans un contexte de société traditionaliste rigidement corsetée. Pas très longtemps, car des types mal intentionnés, se réclamant de ces polices des mœurs qui sévissent encore dans trop de pays à travers le monde, débarquent et les prennent à partie vertement, badine à la main.

La montée en tension est explosive, indignante, écœurante. Glaçante, surtout… Le contraste entre le cadre bucolique, baigné de soleil et de verdure, et ce qui se joue, à savoir les excès d’une autorité autoproclamée ultra-conservatrice – et à la lisière de la légalité – ne laisse pas indemne. Dans un effet miroir se ferme une boucle initiée par le dénouement même d’Autotune, qui montre comment, chez nous aussi, l’action des forces de l’ordre reste sujette à caution, dans sa mécanique systématiquement sélective et arbitraire. Le débat n’est pas clos, hélas, et le cinéma continue heureusement d’apporter son écot à la réflexion dans une atmosphère pré-électorale déjà polluée par les prévisibles thèmes dits sécuritaires.

Christophe Chauville
 

Top of the Shorts, dimanche 9 mai à 22h20 sur Canal+ Cinéma, puis en rediffusion et replay.

À voir aussi :

- D’autres films en plan-séquence, pour quelques jours encore sur Brefcinema, comme Soleil bas de Vincent Drouin ou Corpus/corpus de Christophe Loizillon.

À lire aussi :

- Le numéro du 25 avril de Top of the Shorts.