Festivals 14/05/2020

Rencontre avec Christine Gendre, d’UniFrance : l’export au point mort ?

En cette période de très fortes turbulences sur la diffusion des films à l’échelle internationale, nous avons souhaité interroger Christine Gendre, responsable du service “courts métrages” d’UniFrance, sur cette situation aussi inédite que périlleuse pour les professionnels.



Quel a été concrètement l’impact de la crise sanitaire sur la diffusion des courts métrages français à l’international ?

Très clairement, l’impact sur la diffusion se fait sentir. Plusieurs films ayant amorcé un début de carrière prometteur grâce à Sundance, Berlin ou Rotterdam notamment, n’ont pu poursuivre leur lancée sur l’échiquier des manifestations soutenues par UniFrance. Et s’il faut saluer les initiatives de festivals offrant des éditions dématérialisées, il n’en reste pas moins que la plupart se voient contraints de restreindre le nombre de films sélectionnés. Espérons alors que les manifestations reportées au second semestre puissent accueillir et offrir une belle visibilité aux œuvres “nouvelles” pour l’instant mises sur la touche.  

Quels sont les courts qui circulaient particulièrement bien avant ces événements inattendus ?

La carrière d’un film court à l’étranger pouvant s’étaler sur deux ans, ce sont des titres comme Nefta Football Club d'Yves Piat, Olla d'Ariane Labed (photo ci-dessous, en fin d'article), La distance entre le ciel et nous de Vasilis Kekatos, She Runs de Qiu Yang (photo de bandeau), Les petites mains de Rémi Allier ou The Van d'Erenik Beqiri, pour ne citer que ceux-là, qui ont rencontré les plus beaux succès.

Côté animation, Mémorable de Bruno Collet, Oncle Thomas. La comptabilité des jours de Regina Pessoa, Toomas Beneath the Walley of the Wild Wolves de Chintis Lundgren (photo ci-dessous), L’heure de l’ours d'Agnès Patron, Moutons, loup et tasse de thé… de Marion Lacourt et Je sors acheter des cigarettes d'Osman Cerfon ont pour leur part bénéficié d’un très bel écho hors Hexagone. Et c’est sans compter les films d’école, qui jouissent eux aussi d’une exposition importante sur le circuit des festivals internationaux. Parmi eux, Hors piste (École des nouvelles images), The Ostrich Politic (Les Gobelins), Swatted (Le Fresnoy), The Stained Club (Rubika) et bien d’autres encore.

Comment évalueriez-vous les conséquences directes de ce soudain coup d’arrêt ?

Les sociétés de production sont fragilisées, fonctionnant a minima pour certaines, et les tournages sont ralentis ou arrêtés. Nous allons devoir attendre plusieurs mois avant de découvrir de nouveaux courts. Pour autant, et quand bien même l’avenir est incertain, nous restons actifs et proches de nos adhérents. La période inédite et particulière que nous traversons tous nous oblige à la réflexion, à repenser nos outils et à réinventer pour adapter le plus possible nos actions à de nouveaux besoins. C’est là tout le sens de notre mission à UniFrance : être à l’écoute et prêts à rebondir en attendant que se dessine devant nous un avenir meilleur.

Y a-t-il eu au sein des multiples festivals avec qui travaille UniFrance des initiatives alternatives de réorientation en ligne ou autre ?

Depuis mi-mars et si l’on se projette jusqu’à fin juin, 13 festivals se  sont déroulés ou s’organiseront en version digitale. Parmi eux, Oberhausen, “Visions du Réel” à Nyon, “Trickfilm” à Stuttgart, “Go Short” à Nimègue, Cracovie et, bien sûr, Annecy. D’autres ont pris le pari de reporter leur édition au cours du second semestre. C’est le cas d'“IndieLisboa” à Lisbonne, de Vila do Conde, d'Animafest à Zagreb, de “Short Shorts” à Tokyo, de Molodist à Kiev, par exemple. Et malheureusement, trois ont dû faire le difficile choix d’annuler leur événement cette année (le festival francophone de Vienne, Richmond et San Francisco). Restant au plus près des uns et des autres, nous relayons sur nos réseaux les informations qu’ils nous transmettent et nous accompagnons sous de nouvelles formes les festivals qui se tiennent en ligne . Avec le vif espoir que revivent bientôt sur les écrans du monde entier les courts, métrages français…

Quel bilan tirez-vous de l’élargissement de MyFrenchFilmFestival durant la période de confinement ?

Nous nous sommes mobilisés depuis le début du confinement pour proposer une offre de 70 courts métrages issus des 10 dernières éditions du festival, sous-titrés en plus de 10 langues et visibles gratuitement dans le monde entier. En atteignant le million de vues pour ces films à mi-parcours, le succès a dépassé nos espérances au point que nous avons décidé de prolonger cette “Stay Home Edition” jusqu’au 25 mai, en l’augmentant d’une sélection de 20 longs métrages. Nous recevons de nombreuses marques de soutien et remerciements des publics du monde entier, et en particulier des territoires où les audiences sont les plus fortes : en Amérique latine (Mexique, Brésil, Colombie, Argentine…), au Japon, aux États-Unis et dans de nombreux pays européens… C’est la preuve que le public aime et recherche la qualité et la diversité de notre cinéma. 

Propos recueillis par mail par Christophe Chauville

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