En salles 20/10/2019

Une autre vie au cinéma pour “Braquer Poitiers”

L’un des moyens métrages les plus remarqués en 2019 dans les festivals, “Braquer Poitiers” de Claude Schmitz, accède à une sortie salles, complété d’un épilogue, à partir de ce mercredi 23 octobre.

Découvert en février au Festival de Clermont-Ferrand et auréolé du Prix Jean-Vigo du court métrage 2019 pour sa version de 59 minutes et des poussières, la comédie décalée et inclassable de Claude Schmitz sera distribuée fin octobre par Capricci Films/Les Bookmakers, le réalisateur ayant tourné en “complément” un épilogue d'une vingtaine de minutes permettant de retrouver les personnages du film initial après quelque temps écoulé. C'est d'ailleurs un vrai plaisir de les retrouver, même si la première mouture se serait sans doute largement suffie à elle-même...

 

 

 

 

 

 

 

Après Rien sauf l'été (2017), Claude Schmitz creuse encore un peu plus, avec Braquer Poitiers, ses principes de direction d'une troupe d'amis interprètes dans un lieu précis, à savoir cette fois la propriété d'un patron de “car-wash” pris en otage par un duo de Pieds nickelés, bientôt rejoints par leurs petites amies respectives. Sauf que rien ne se passe comme prévu dans l'univers de ce créateur dont l'activité théâtrale influe sur la versant cinématographique de ses travaux, et le dénommé Wilfrid, dans une variante insolite du syndrôme de Stockholm, est tout heureux d'avoir ainsi de la compagnie brisant sa solitude (il n'a ni femme, ni enfant, et pas davantage d'amis...).

Ce que Schmitz tire de ses comédiens, souvent au long de scènes qui savent prendre le temps nécessaires, est assez prodigieux (voir la scène, déjà fameuse, de “Ces gens-là” de Jacques Brel, interprétée par l'impayable Francis). Une atmosphère unique est ainsi peu à peu posée, entre langueur, drôlerie (plutôt belge !) et renoirienne sensualité, au fil de cet été en pente douce où l'enjeu matériel – soutirer du fric à Wilfrid – devient vite dérisoirement accessoire et où l'exploration d'une curieuse comédie humaine s'affirme comme la boussole d'un réalisateur dont l'appétit de tourner est évident, sans grands moyens et avec foi (mais aussi modestie) en sa propre inventivité. Le goût du verbe, gouailleux et coloré, ravit toujours, même si l'épilogue s'avère un peu plus verbeux, et moins lumineux à tous les sens du terme. Mais il est certain qu'on suivra attentivement le parcours de ce cinéaste traçant sa route en marge des chemins codés.

Christophe Chauville

 


À lire aussi :

- Braquer Poitiers, lauréat du Prix Jean-Vigo du court métrage 2019.

- Le palmarès du 16e Festival du film de Brive, rencontres du moyen métrage.