En salles 16/03/2022

Juke-box en avant-programme de Funambules

Le nouveau film d’Ilan Klipper dure 1h15 et se voit distribué en salles par Potemkine, à partir de ce mercredi 16 mars, précédé du fameux court métrage tourné par le réalisateur avec le regretté Christophe en 2013.

L’initiative – qui émane de cet excellent label qu’est Potemkine Films – demeure atypique et mérite d’être mentionnée pour sa cohérence. Une cohérence double, car accompagner un long métrage de durée réduite par un court du même réalisateur n’est toujours pas monnaie courante, d’une part, et tisser un lien thématique ou sensitif entre les deux films apparaît hautement pertinent, de l’autre.

Présenté à Cannes par l’Acid en 2021, Funambules permet à Ilan Klipper de renouer avec ses débuts de documentariste après avoir signé la fiction Le ciel étoilé au-dessus de ma tête en 2017. À la fin des années 2000, on se souvient qu’il avait collaboré avec Virgil Vernier, successivement sur Flics et Commissariat, puis en solo sur Sainte-Anne, hôpital psychiatrique (2010). Ce film explorant les limbes de la psychiatrie a de façon lointaine inspiré ce nouveau film, Funambules, construit entre docu et fiction autour de plusieurs figures évoluant aux lisières de ce qu’on peut appeler la folie, en un terme générique évitant de se poser d’autres questions.

Aube, Yoann, Marcus et Jean-François sont “border line”, enfermés dans leur propre truc comme dans leur appartement : un espace mental pour la jeune femme, un établissement psy, un bric-à-brac indescriptible et un dépotoir résultant d’un syndrome de Diogène sévère, pour les trois hommes respectivement. Évidemment, le regard du réalisateur ne leur “vole” rien et reste bienveillant, loin de tout jugement, mais sans évacuer la dimension du trouble, qui fait de ces curieux héros des téméraires marchant en effet sur une corde raide au-dessus du vide.

Dans Juke-box, le chanteur Christophe – tragiquement disparu au printemps 2020, comme on s’en souvient – jouait Daniel (son vrai prénom), compositeur restant cloîtré chez lui également et ses obsessions tournaient à une totale perte de repères, un divorce d’avec la réalité que l’irruption des personnages interprétés par Sabrina Seyvecou et Marilyne Canto mettait au révélateur. La programmation en avant-programme de ce court “culte”, déjà apprécié par le passé sur Brefcinema, apparaît totalement pertinente et lui permettra sans doute de gagner de nouveaux aficionados, en attendant un prochain film, déjà, intitulé Le processus de paix et qui réunira Camille Chamoux (aperçue dans Funambules), Damien Bonnard et Jeanne Balibar.

Christophe Chauville

À lire aussi :

- Sur Le ciel étoilé au-dessus de ma tête, sorti en 2018.

- Une autre démarche documentaire forte : Sans frapper d’Alexe Poukine.