En salles 05/04/2023

D’autres héros et héroïnes que les mousquetaires et le plombier !

Dur dur de sortir le même jour que le premier volet des “Trois mousquetaires” version Bourboulon et les aventures new look de Mario, mais certains devraient pouvoir tirer leur épingle du jeu…

Tout le monde ne va pas se ruer uniquement dans les salles, durant le ce week-end rallongé qui s’annonce, pour s’amuser devant les aventures de D’Artagnan ou celles du nouveau Mario animé – ou alors pas tout de suite ! –, tant la semaine regorge d’autres sorties méritant de ne pas passer au second ou troisième plan.

Plusieurs anciens et anciennes du court sont également sur le pont, du reste, avec leurs derniers longs métrages en date. On veut parler d’Olivier Babinet (Normale), Lucie Borleteau (À mon seul désir), Guillaume Bureau (C’est mon homme) et Mathias Gokalp (L’établi, photo ci-dessous). Souhaitons leur de trouver leur public, L’établi semblant avoir un temps d’avance à cet égard, adaptant librement un livre de Robert Linhart revenant sur son expérience de travail en usine, au moment où, aux lendemains de Mai 68, des intellectuels et/ou militants gauchistes s’infiltraient en entreprise pour comprendre le système de l’intérieur et le changer en vue du Grand soir. Le film est en tous points passionnant, et nuancé, porté par un Swann Arlaud une nouvelle fois à la hauteur de son personnage.

Des cinéastes précédemment cités, seul Guillaume Bureau en est au passage au long, après plusieurs films courts parfois chroniqués dans les pages de Bref, tels L’homme du lac et Sylvain Rivière en 2010 et 2011. Notons que Ghislain de Fonclare, l’acteur de ces films, comme de Portrait d’un inconnu (en coréalisation, 2022), apparaît aussi dans C’est mon homme (photo ci-dessous), en médecin désorienté par l’étrange cas du personnage principal, soldat de la grande guerre devenu complètement amnésique et “réclamé” successivement par deux épouses déclarées.

Deux autres propositions de la semaine s’avancent sur le terrain de l’animation. Tout d’abord la réédition du Petit hérisson dans la brume de Youri Norstein au sein d’un programme distribué par Malavida Films, sous le titre Le petit hérisson dans la brume et autres merveilles (assumant donc un décalage sémantique de la brume au brouillard), chroniqué par ailleurs (texte à lire ici). Et aussi le programme À vol d’oiseaux, cococté par Gebeka et incluant trois courts métrages : Le tout petit voyage d’Emily Worms, L’air de rien de Gabriel Hénot-Lefèvre et Drôles d’oiseaux de Charlie Belin (visuel ci-dessous), un 26 minutes aux teintes douces en aquarelle récompensé en début d’année du Prix SFCC du meilleur court métrage 2023.

Enfin, on tâchera surtout de ne pas rater cette semaine le beau documentaire d’Audrey Ginestet Relaxe (photo de bandeau), présenté à Cinéma du Réel en 2022 et qui revient sur l’affaire du (faux) “groupe de Tarnac”, accusé d’actes de terrorisme sous la présidence Sarkozy et qui ne résultait en fait que d’une élucubration de certains services de police. La réalisatrice suit l’une des inculpées avant son procès, près de dix ans après les faits. Et sa caméra entre dans l’intimité de la préparation de cette échéance capitale, qui montre que ce sont bien au final certaines idées qui furent ainsi délibérément ciblées et stigmatisées.

Beaucoup d’écho avec l’atmosphère de la période actuelle, donc, et un positionnement honnête et empreint d’humanité de la part d’une cinéaste passée par le format court (avec Dokonan en 2004 et Spring Yes Yes Yes en 2012), également ingénieure du son et qui était à l’initiative du stimulant projet “Audiostories”, il y a quelques années, en binôme avec notre collaboratrice régulière Amanda Robles.

Enfin, sur le volet des films étrangers, le délicat Kokon de l’Allemande Leonie Krippendorff (photo ci-dessus), remarqué à la dernière édition du Festival Chéries-Chéris, mérite le détour, sur un postulat en apparence commun de début d’adolescence (le titre est éloquent), celui de Nora, quatorze ans, plongée dans un été berlinois caniculaire et cherchant sa voie, toujours à la traîne de sa sœur aînée et rencontrant l’amour, le premier, en la personne d’une nouvelle venue dans les environs. Délicat et intelligent, de la part d’une réalisatrice dont c’est déjà le troisième long métrage, après quelques courts il y a une dizaine d’années.

Christophe Chauville

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- Sur un moyen métrage où Audrey Ginestet fut ingénieure du son : Famouras.