“Plus qu’hier, moins que demain”, vingt ans après

Il y a deux décennies sortait en salles le premier long métrage de Laurent Achard, un film qui venait creuser les motifs intimes et plastiques esquissés en amont dans deux courts métrages remarquables tout en ouvrant le récit, ample, à une pluralité de points de vue et de personnages. Une histoire de famille, donc, de retour et de secrets dévoilés, soit les ingrédients de populaires “feuilletons de l'été” d'alors, accommodés par un cinéaste épris d'affects et de mélodrame classique. Si le film, rare et pas si connu, fut un peu oublié deux décennies durant, Achard poursuivit, lui, son œuvre essentielle – entre documentaires, courts et longs – aussi discrètement que résolument.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Si Plus qu'hier, moins que demain dialogue étroitement avec Dimanche ou les fantômes (1994) et Une odeur de géranium (1997), c'est bien sûr qu'il en reprend les espaces (la rivière, la maison), les personnages (un fils et sa mère, un garçon et sa grande sœur, un père affaibli, un maçon sans papiers), mais surtout parce que, d'un film à l'autre, c'est une même histoire qui semble se raconter, se développer avec bonheur, au gré de variations obsessionnelles renouvelant l’œuvre en toute cohérence, ainsi qu'en attesteront encore, quelques années plus tard, le court métrage La peur, petit chasseur (2004) et le long métrage Le dernier des fous (2007).

Logique dès lors que La Traverse, éditeur de films de la société Diagonale ou de Jean-Daniel Pollet dernièrement, ait aussi choisi de faire figurer sur ce DVD Dimanche ou les fantômes et La peur, petit chasseur, deux films (restaurés eux aussi) encadrant chronologiquement Plus qu'hier, moins que demain dans un trajet formel allant, si l'on veut, de la fugue renoirienne (Dimanche… / Plus qu'hier…) vers une sécheresse toute hanekienne (La peur, petit chasseur / Le dernier des fous), en surface du moins...

Renoir, revenons-y un instant, tant Une partie de campagne s'affirme d'années en années, en France, comme un film-matrice aussi important que le fut – et l'est encore – Vertigo ailleurs, et tant Plus qu'hier, mois que demain dénoue ses fils narratifs dans une longue partie centrale au bord de l'eau qui occupe plus de la moitié du métrage et qui impressionne durablement par la maîtrise conjuguée de la topographie et de la dramaturgie.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

On le pressentait il y a vingt ans et La peur, petit chasseur viendrait vite le confirmer : Laurent Achard fut – et demeure – un immense metteur en scène. Le grand mérite de cette restauration inespérée est de le rappeler avec éclat et évidence aux plus distraits des cinéphiles.

Stéphane Kahn
 

Plus qu'hier, moins que demain de Laurent Achard, DVD, La Traverse/Éditions de L'œil, 20 euros.
Disponible depuis le 27 novembre 2010.

 

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