En salles 03/05/2017

Pour avoir la niaque cette semaine...

Chad Chenouga est de retour et cela nous fait grand plaisir, d’autant que ce qu’il a à nous dire est sensible, intelligent et généreux, ce qui est précieux en ces temps de résistance à l’obscurantisme.

Une évidence thématique, ainsi qu’une large dimension autobiographique, c’est ce qui relie le deuxième long métrage de Chad Chenouga à son premier, 17 rue Bleue, sorti il y a seize ans déjà. Si le décès d’une mère élevant seule son fils était alors au cœur du scénario, il est plutôt le point de départ de De toutes mes forces, qui, d’une certaine manière, pourrait en constituer une suite directe.

Ici, Chad Chenouga s’intéresse plus à l’après, à la vie en foyer de Nassim, lycéen des beaux quartiers soudain forcé de mener une toute autre vie, de cohabiter avec des jeunes qui n’ont, croit-il, rien à voir avec lui. Quitte à cacher la disparition de sa mère et son nouvel environnement social aux amis de sa classe, le processus de dissimulation, le poids du secret renvoyant directement à la problématique de L’attache, court métrage qui fit repérer Chad Chenouga, dans lequel Romain, son personnage principal (interprété par un Saïd Taghmaoui tout juste sorti de La haine), cachait à ses condisciples d’école de commerce son véritable prénom – Djamel – ainsi que ses origines, tant sociales que familiales.

Un an plus tard, le court métrage Rue Bleue reliait la fiction à l’autobiographie et amorçait de la plus belle manière le long tourné quelques années plus tard avec la même actrice (Lysiane Meis) dans le rôle de la mère. Entre ces quatre films lardés de connexions et une pièce de théâtre, La niaque, racontant aussi, en 2011, son placement en foyer, on aura retrouvé trace de Chad Chenouga côté court, à travers un joli film de commande pour une série du CRIPS contre les discriminations. Ce Zcuse-nous de 2008 offrait à Anaïs Demoustier l’un de ses premiers rôles marquants et frappait par le regard doux et bienveillant du réalisateur.

Cette bienveillance, cette générosité, cette faculté à filmer et entendre chacun se déploient aujourd’hui dans un film à la fois chaleureux et âpre, où sa capacité à diriger de jeunes acteurs pour la plupart encore non-professionnels, à donner corps à une bande, constitue une réelle réussite.

Stéphane Kahn

Filmographie courts métrages de Chad Chenouga
Poison rouge (1992, 12 min)
Batata (1994, 17 min)
L'attache (1996, 26 min)
Rue bleue (1997, 24 min)
Si j'ose dire (2004, 6 min)
Zcuse-nous (2008, 5 min 40)
L'hachouma (2014, 27 min)