En salles 10/05/2017

L’air du large selon Marine Place

La Lilloise Marine Place a tourné en Bretagne “Souffler plus fort que la mer” et poursuit son bonhomme de chemin, qu’il est tentant d’appréhender sous l’angle du passage du court au long.

Dans Traverser, déjà, un lien de compassion et de solidarité reliait deux êtres n’ayant pourtant rien en commun, une femme condamnée par un cancer et un migrant en mauvaise posture, que la première décidait d’aider avant de disparaître. Les petites gens, ouvriers ou marins-pêcheurs restent dignes et généreux chez Marine Place : dans Souffler plus fort que la mer, c’est pourtant un cataclysme qui emporte la famille de Loïc et Louison (Aurélien Recoing et l’impériale Corinne Masiero), perclus de dettes et devant se résoudre à vendre l’Indomptable, ce petit bateau qui représente plus qu’une simple activité économique, mais toute une vie, des racines, une raison même d’exister... Le monde vacille alors aussi pour Julie, la fille du couple, décidée à lutter, mais qui se laisse peu à peu gagner par la perspective d’une autre vie, s’ouvrant au monde et choisissant finalement de quitter sa petite île exigüe au large des côtes bretonnes.

Sans chercher à filer de façon excessive la métaphore, on savoure le cheminement de tels personnages, qui rappelle celui de la jeune apprentie en couture du Sommeil du funambule, saisissant l’occasion d’échapper à son destin trop bien fixé en rencontrant une artiste de cirque lui faisant entrevoir de nouveaux horizons, y compris sur le plan émotionnel ou charnel.

Parfois fragile et ténu, le cinéma de Marine Place est nimbé d’une délicatesse que traduisait déjà, au milieu des années 1990, Rebonds, ou la première confrontation à la mort d’un enfant jouant avec son ballon dans la cour de la maison où sa grand-mère exhalait ses derniers souffles. Le ton oscillait entre tendresse et gravité, ce qui caractérise toujours Souffler plus fort que la mer, dont la sincérité et la chaleur du regard rachètent certaines maladresses, ce qui est de toute évidence précieux alors que nous sortons de la période que l'on sait, plutôt éprouvante.

Christophe Chauville

Filmographie courts métrages de Marine Place
Rebonds (1995, 11 min)
Dans la rue (1997, 9 min)
Le sommeil du funambule (2006, 33 min)
Traverser (2010, 24 min)