En salles 24/05/2017

À la poursuite de l’enfant oiseau

Un long métrage d’animation à destination des adolescents et des adultes, précédé d’un court métrage du même réalisateur, c’est le pari relevé par "Psiconautas", remarqué l’année dernière à Annecy et qui arrive en salles cette semaine, accompagné de l’éblouissant "Decorado".

Alberto Vázquez est espagnol (et même galicien, né en 1980 à La Corogne) et ses deux films distribués ensemble par Eurozoom ont été coproduits par la société parisienne Autour de minuit. Le court métrage Decorado et le long Psiconautas ont effectué depuis une bonne année et demie leur carrière dans les festivals selon des trajectoires parallèles, chacun décrochant en février 2017 le Goya de sa catégorie, ce qui est sans doute unique dans les annales, et pas seulement en Espagne.

Découvert à la Quinzaine des réalisateurs l’an dernier, Decorado est un formidable condensé d’humour noir, jouant sur une anthropomorphisation très poussée de petits personnages plutôt “mignons” – “kawaii”, dirait-on précisément dans la culture japonaise – et placés face à des considérations métaphysiques empreintes d’humour, à savoir en résumé : “Et si tout ce qui nous entoure n’était qu’un décor de théâtre ?”… Se repérer et trouver sa place entre le vrai et le faux : le cinéma d’animation d’Alberto Vázquez s’adresse incontestablement aux adultes, même si Psiconautas ambitionne de capter un public adolescent en impulsant un redéploiement narratif vers un univers enchanté et onirique à la fois, “entre Lewis Carroll et Guillermo Del Toro” comme le proclame l’affiche française de la distribution du programme.

Adapté d’une bande dessinée déjà signée de l’auteur, Psiconautas embrasse vaillamment beaucoup de thématiques (la fin de l’enfance, l’environnement, le racisme, l’intolérance, etc.) et prend la forme d’un puzzle s’imbriquant peu à peu entre différents protagonistes, dont l'enfant oiseau qui avait jadis fait l’objet d’une première collaboration entre Vázquez et Pedro Rivero. L’ampleur visuelle de ces aventures – colorées cette fois, en contraste avec le noir et blanc et les grisés de Decorado – se teinte le plus souvent d’une noirceur implacable, sinon macabre. De quoi dériver vers les rivages de l’exploration existentielle, un peu à la manière des petits protagonistes de Decorado gentiment assis, au début et à la fin du film, devant un magnifique paysage, apaisant et pourtant éventuellement factice et trompeur.

Christophe Chauville

Filmographie courts métrages d'Alberto Vázquez 
Birdboy (2011, co-réalisé avec Pedro Rivero, 13 min)
Sangre de unicornio (2013, 9 min)
Decorado (2016, 11 min
)